Olivier Vasseur a repris l’exploitation familiale située à Bailleau-l’Évêque (Eure-et-Loir) à partir de 2015. « Auparavant, la rotation était très simplifiée avec du colza, du blé puis de l’orge, ainsi qu’une vingtaine d’hectares de pois protéagineux. Mon père, qui était à 100 % en labour, appréciait cette culture comme précédent pour ses blés », explique l’agriculteur.
Labour non systématique
Mais pour Olivier, ce système était problématique en raison d’un déséquilibre net entre cultures d’automne et de printemps, ainsi qu’entre pailles et dicotylédones. « De fait, il était dépendant aux phytos et n’intégrait pas d’approche liée au paysage et à la biodiversité », juge-t-il.
Le parcellaire, groupé, a d’abord été redécoupé en onze parcelles d’une vingtaine d’hectares chacune. « Cela me permet de décider d’en labourer une pour une raison agronomique – comme la gestion des adventices – ou encore de ne pas le faire, afin de répondre à la demande de clients. J’arrive à un labour environ un an sur trois et à une meilleure gestion de mes précédents », estime Olivier.
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Autre choix, et de taille : la diversification de l’assolement, qui est passé de quatre à quatorze espèces (voir l’encadré Le contexte). Désormais, un tiers des cultures sont de printemps et il y a un équilibre entre les espèces. « Pour limiter mon exposition aux marchés mondiaux, je me suis spécialisé en multiplication de semences, activité qui représente deux tiers de ma sole. C’est une approche assez extrême, mais elle m’a permis d’aller chercher des espèces d’intérêt agronomique auxquelles j’aurais eu plus difficilement accès. »
Irrigation depuis 2021
Tout s’est accompagné de dates de semis décalées : avant le 15 août pour le colza et après le 15 octobre, voire en novembre pour les céréales. Il s’agit d’un levier pour lutter contre les insectes à l’automne – altise sur colza et pucerons virulifères sur céréales – et contrer la levée des graminées dans les céréales. « À mon arrivée, les vulpins et quelques ray-grass devenaient difficiles à contrôler », se remémore-t-il.
Désormais, la proportion de cultures de printemps et les semis décalés l’exposant plus fortement aux risques météorologiques, l’exploitant a investi dans l’irrigation pour sécuriser le système les années sèches. « J’ai aussi retravaillé les enchaînements de cultures, selon moi un point important dans la reconception de système, poursuit-il. Ainsi, le colza permet une bonne gestion des graminées et, après une légumineuse, il valorise bien mieux l’azote laissé par le précédent qu’une céréale. Sous réserve qu’il y ait suffisamment d’eau, le colza est alors plus vigoureux et résiste aux altises. Cet automne, je n’ai pas utilisé d’insecticide. Or avec l’interdiction du phosmet, cela devient un vrai sujet ! »
Mais selon Olivier, il est difficile de réfléchir à un système sans remettre le sol au premier plan. Les couverts végétaux ont constitué sa porte d’entrée. Des mélanges de dix à douze variétés ont été implantés pour « verticaliser les sols », mieux stocker l’eau et bien mobiliser les éléments fertilisants.
La ferme fait partie d’un groupe Dephy et ses IFT (voir l’infographie) sont suivis. « Mon père avait une approche assez intense. De mon côté, j’estime qu’avec une rotation sur une dizaine d’années environ, un problème de salissement une année se rattrapera les années suivantes. Donc, plus de double antigraminées sur paille, et quasiment jamais de rattrapage au printemps sur céréales », ajoute Olivier. Il a, de plus, la volonté de limiter les insecticides et utilise notamment de l’huile essentielle d’ail contre l’altise sur le lin.
Avec la multiplicité des cultures, la gestion des traitements est toutefois plus complexe. C’est ainsi qu’en 2021, l’agriculteur a été confronté à des chardons, d’autant qu’il avait passé deux mois sans pulvérisateur. « Il y a une prise de risque à court terme, mais je suis convaincu qu’a moyen et long termes, le système est durable, car il génère des économies, notamment de phytos (charges de 150 €/ha en 2020, malgré la betterave, une culture assez gourmande) et d’engrais (107 unités d’azote/ha en 2021), conclut-il. Ma double activité m’a permis d’être plus tolérant à ce risque financier à court terme. »
C. Fricotté