L’association Agribio 04 teste, depuis 2019, les associations d’espèces en grandes cultures en partenariat avec des producteurs des Alpes-de-Haute-Provence et la coopérative GPS, située à Manosque. « Avec la multiplication des épisodes climatiques atypiques dans le Sud-Est, les agriculteurs ont de plus en plus de difficultés à réaliser leurs semis dans de bonnes conditions, indique Mathieu Marguerie, conseiller grandes cultures à Agribio04. Les rendements s’en trouvent affectés. Miser sur deux espèces réduit les risques et permet aussi de limiter les intrants. » Agribio 04 a expérimenté plusieurs modalités.
Semis dissociés
La première a consisté à semer et à récolter, en même temps, du blé dur et des lentilles bio chez trois producteurs alpins. Les semis ont eu lieu au mois de février : 85 kg/ha pour le blé et 80 kg/ha pour les lentilles. Intérêt : la céréale pousse plus vite que la légumineuse. Sa présence crée un couvert végétal qui protège la lentille des adventices. À la récolte, le blé dur a produit 19 q/ha et la lentille 10 q/ha. « Ce sont des rendements tout à fait acceptables dans nos conditions, souligne Mathieu Marguerie. De plus la coopérative GPS valorise la lentille à 1 700 €/t. La rentabilité des deux cultures associées est ainsi supérieure à la culture pure. » Seul bémol, le mélange à la récolte s’avère difficile à trier. Pour y remédier, GPS a investi dans un trieur optique.
Autre stratégie, introduire une espèce dans un blé déjà implanté. « Au printemps, nous avons semé une variété de blé tendre spécifique à la région, la Saissette de Provence, à 180 kg/ha, explique Mathieu Marguerie. Au mois de février, nous avons semé dans ce blé de l’ers, une plante pour l’alimentation animale adaptée aux sols séchants, à deux doses différentes : 60 et 120 kg/ha. » La Saissette a réalisé un rendement identique à celui de la plantation pure : 22 q/ha. Son taux de protéine, 12,5 %, est supérieur de 0,5 % au blé seul. Semé à 60 kg/ha, l’ers a produit 300 kg/ha ; semé à 120 kg/ha, il a produit 400 kg/ha. Mathieu Marguerie déconseille de semer les deux plantes au même moment car le blé subit la concurrence de l’ers.
Avec le lycée agricole d’Aix-Valabre, Agribio 04 a également testé la solution suivante : semer deux espèces en même temps et n’en récolter qu’une seule. « Deux rangs sur trois sont dédiés au blé, le troisième à la féverole », précise Mathieu Marguerie. Les semis ont lieu en novembre. « Nous détruisons la féverole entre mars et avril grâce à un binage simple. Cette action favorise la minéralisation du sol et apporte de l’azote au blé. » Résultats, le blé a atteint un rendement identique à celui d’une culture seule. Mieux encore, le taux de protéine est augmenté de 0,4 à 0,5 % suivant les parcelles. Ce programme va se poursuivre cette année.
Chantal Sarrazin