Bandes mellifères
Un système favorable à la biodiversité
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En non-labour depuis vingt-cinq ans, Antoine Varoteaux a instauré en 2019 des bandes mellifères propices aux insectes auxiliaires et à la petite faune. Il souhaite ainsi réduire l’emploi des phytos, et notamment les insecticides.
Déjà engagé en 2004 dans une démarche d’agriculture raisonnée, Antoine Varoteaux avait alors créé des bandes enherbées à base de fétuque et de dactyle afin de réduire la taille du parcellaire. Après l’intégration, en 2012, de l’exploitation dans l’aire d’alimentation de captage de Marle, « transmettre une eau potable aux générations futures » est devenu pour lui une priorité. Il a donc souscrit l’an dernier à deux MAEC (mesures agro-environnementales et climatiques). La première consiste à réduire l’emploi des phytos, hors herbicides (lire l’encadré ci-dessous). La seconde a pour but de créer des bandes mellifères afin d’améliorer la biodiversité. « Ce programme était établi sur deux ans mais entre-temps les modalités de la mesure ont changé avec, notamment, une augmentation de la largeur minimum des bandes et des compensations financières diminuées. Le projet initial n’a donc pas abouti », informe Antoine Varoteaux (lire l’infographie p. 25).
« Avoir des ruches démontre que les abeilles peuvent cohabiter avec une agriculture raisonnée. »
Faire sa semence de ferme
Sa démarche est toutefois le résultat d’une réflexion plus globale. En 1995, il a opté pour le non-labour à la suite d’une formation avec le chercheur Claude Bourguignon et, simultanément, à sa rencontre avec les équipes techniques de l’entreprise TMCE (qui vend des produits minéraux). Le taux de matière organique est ainsi passé de 1,7 à 2,4 %, avec un indice de battance réduit, une érosion moindre, la portance des sols améliorée, mais aussi une faune plus variée. « 80 % de la vie sur terre se trouve sous terre, donc je prends le temps de l’observer et de mieux comprendre son comportement », affirme l’agriculteur.
Pour lui, pas de biodiversité sans une diversité au sens plus large. Cela passe, depuis vingt-cinq ans, par l’enfouissement des résidus, des apports variés d’amendements organiques, un assolement comprenant de nombreuses espèces d’engrais verts, du colza avec des plantes compagnes… Il pratique l’association de variétés sur blé et colza pour des cultures plus fortes. « Je fais aussi ma semence de ferme car, au fil du temps, cette dernière s’adapte à mon terroir et à mes techniques. Elle devient plus résistante aux bioagresseurs et nécessite moins de phytos », juge-t-il.
En revanche, au niveau de l’assolement, il a dû arrêter le pois de conserve à cause de l’Aphanomyces, mais aussi la féverole en raison de la bruche. « Je ne pouvais pas conserver une culture dégradant la biodiversité. D’ailleurs, avec le retrait des néonicotinoïdes, on peut se questionner quant à l’avenir de la betterave, sur laquelle nous passons désormais plusieurs insecticides contre puceron en végétation. Si on ne fait rien, il pourrait y avoir un désordre environnemental et tout un tissu rural et économique pourrait être remis en cause », s’inquiète l’exploitant.
Réservoir à nectar
Finalement, l’aboutissement de ce parcours demeure la mise en place de trois ruches en 2020. « Les abeilles sont d’excellents indicateurs de la biodiversité, appuie Antoine Varoteaux. Mais accueillir des ruches dans l’exploitation, c’est aussi démontrer que ces insectes peuvent cohabiter avec une agriculture raisonnée, car nous ne sommes pas des pollueurs et n’appliquons que des produits homologués. »
Il faut aménager un « réservoir à nectar pérenne ». Après la floraison du colza et des arbres fruitiers, les plantes mellifères puis la jachère à base de phacélie implantée en fourrière du lin (photo ci-contre) prennent successivement le relais. Vient ensuite la floraison des bandes enherbées à base de trèfles et de luzerne. Broyées avant le 15 avril, elles assurent l’alimentation des insectes durant l’été, avant qu’ils se nourrissent avec les lierres aux alentours et les engrais verts. Tout ce qui a été mis en œuvre au fil des ans favorise, par ailleurs, d’autres auxiliaires des cultures, tels que les lombrics, les carabes ou encore la petite faune.
Située à Berlancourt, dans l’Aisne, l’exploitation d’Antoine Varoteaux est composée de 190 ha, dont 155 ha sur l’aire d’alimentation de captage de Marle. Il y cultive du blé tendre, du colza, de la betterave et du lin textile. Les engrais verts, qui font partie intégrante de sa démarche, sont composés de trèfle d’Alexandrie, de phacélie, de moutarde (à floraison tardive), de vesces, de roquette et de radis.
« Ce que j’ai déjà mis en œuvre m’a permis de réduire mes apports d’engrais et en partie le recours aux phytos. Mais mon idée est d’anticiper l’avenir avec l’aide de la biodiversité, explique Antoine Varoteaux. La souscription des MAE va m’y amener, puisque l’objectif de l’une d’elles est d’avoir un indice de fréquence de traitement de 2,1 (hors herbicides) au terme de cinq ans. Pour cela, je reçois une aide financière de 600 €/ha. Désormais, par exemple, les semences de ferme de blé et colza sont triées puis traitées avec TMF (engrais pour solutions nutritives minérales de la société TMCE). Ce qui me permet d’avoir un IFT de 0 au lieu de 1. En revanche, réduire l’emploi des herbicides restera difficile, avec l’apparition d’adventices résistantes et de moins en moins de molécules disponibles. »
Sols vivants.
Recours moindre aux engrais et aux phytos.
Préservation de la faune auxiliaire.
Disposer de solutions pour répondre aux contraintes imposées à l’avenir.
Difficulté de gestion des vivaces telles que le chardon.
Trouver le temps de s’informer et de se former.
Prise de risques.