Juste avant la pause de Noël, la Commission a transmis à chaque État membre ses recommandations pour les plans stratégiques nationaux qui constitueront la déclinaison de la Pac dans chaque pays. Si l’effort d’analyse est à noter, cet exercice pose la question cruciale de la cohérence entre la Pac et les objectifs de Bruxelles en matière de Green Deal. À la lecture des recommandations, il ne fait guère de doute que la Commission est prête à imposer ses propres idées sans attendre les décisions des co-législateurs en la matière. En effet, l’élaboration et l’approbation des plans stratégiques précéderont l’adoption formelle des objectifs du Green Deal par le Parlement et le Conseil européen.
Or, les propos de Bruxelles sont explicites : « Ces recommandations sont adressées aux États dans le cadre d’un dialogue structuré. Avec d’autres considérations pertinentes, elles seront utilisées par la Commission dans son évaluation des plans stratégiques de la Pac. La Commission vérifiera, au moment de leur approbation et de leur modification, leur cohérence globale avec les objectifs et les cibles du Green Deal. » Afin d’exercer une pression supplémentaire sur les ministères de l’Agriculture, Bruxelles demande que les autorités environnementales nationales soient associées à l’élaboration de ces plans stratégiques.
Avec ces documents de recommandations, elle trace les contours d’une politique dont la physionomie irait d’une politique économique à une politique plus sociale et environnementale. Sa stratégie est explicite : agir sans attendre l’avis des États membres et du Parlement sur le Green Deal. Il revient donc à ces derniers soit d’encadrer clairement les pouvoirs de la Commission – ils en ont la possibilité en insérant dans les négociations Pac les clauses définissant ses pouvoirs d’approbation des plans stratégiques – soit d’accepter que celle-ci les mette devant un fait accompli en matière de déclinaison du Green Deal dans la Pac. Mais nul ne pourra alors se défausser avec un « c’est la faute à Bruxelles ».
Pendant ce temps, de l’autre côté de l’Atlantique, les États-Unis ont renforcé, fin 2020, leurs aides aux secteurs agricoles de quelque 26 milliards de dollars de plus.
par Yves Madre