Il n’y a eu que des bonnes nouvelles au Conseil agricole du 14 mars. La principale est qu’on sait maintenant que le Commissaire Phil Hogan lit La France agricole et mieux, lit la modeste chronique dont j’ai la responsabilité ! Car il y a moins d’un mois, je prétendais qu’en matière agricole, il fallait accepter que les producteurs puissent se regrouper et s’entendre sur les volumes mis sur le marché sans être menacés de sanctions. Des sanctions qui se chiffrent par millions d’euros, comme c’est le cas avec l’affaire du cartel des endiviers mis à l’amende par l’autorité de la concurrence pour s’être entendus sur les retraits des chicons. Du simple bon sens.
Plus sérieusement, la Commission a annoncé une série de mesures intéressantes. Elle a annoncé un relèvement des volumes de poudre de lait pouvant être stockés et aidés par l’Union européenne. Pas sûr que la France en bénéficie beaucoup, car les Français sont d’ordinaire peu intéressés par le stockage privé, mais c’est une mesure de régulation. Bruxelles a surtout accepté d’activer une disposition novatrice. Cette disposition figure dans le principal règlement de la Pac, plus précisément à l’article 222 du règlement dit OCM unique (retenez ce numéro si vous voulez briller en société !). Cet article dit que, en période de déséquilibre grave sur les marchés, la Commission peut accepter que les producteurs s’organisent et conviennent d’ententes pour procéder à des retraits du marché. Une opération de retrait, dans l’espoir qu’une diminution de l’offre permettra de faire remonter un peu les prix.
Cela n’a l’air de rien, mais cette disposition est tout à fait exceptionnelle. D’abord parce que la Commission reconnaît explicitement qu’il y a bien « un déséquilibre grave sur les marchés », mais surtout parce qu’elle constitue une dérogation aux sacro-saintes règles du droit de la concurrence, qui prohibent totalement, fermement, toute entente entre producteurs, industriels, commerçants. Il y a bien théoriquement, une exception agricole mais, en général, les juristes ont du mal à la trouver. Là, l’exception est affirmée, assumée. C’est un bouleversement. Certes, les opérateurs français auraient sans doute préféré une action autoritaire de régulation, de type quotas laitiers par pays. C’était rêver. À charge pour eux d’organiser cette entente, qui ne peut être efficace que si elle rassemble un grand nombre de producteurs de différents pays. Ce ne sera pas facile, mais la balle est dans leur camp.
Troisième bonne nouvelle. Vous ne savez pas trop à quoi sert le Parlement européen et bien maintenant, vous savez : cette disposition a été introduite par un amendement d’un député européen. Je n’ai pas retrouvé qui, mais il peut être content.