Des besoins accrus dans l’industrie du biodiesel et un déficit en huile de tournesol devraient encore faire grimper les prix.
Depuis le 1er juillet 2020, le prix du colza rendu Rouen a augmenté de 55 €/t pour dépasser 420 €/t le 20 novembre, un niveau supérieur au record de l’hiver dernier (416 €/t le 9 janvier 2020). Après une chute entre la fin de janvier et la mi-mars, liée à la crise sanitaire mondiale, les prix se sont lentement mais sûrement orientés à la hausse. Plusieurs éléments sont responsables de ce phénomène.
D’une part, la récolte de colza de l’Union européenne (UE) a été une nouvelle fois très basse, dépassant à peine, pour la seconde année consécutive, 17 millions de tonnes. D’autre part, les disponibilités en colza de l’Ukraine, l’un des principaux fournisseurs de l’UE, se sont fortement contractées, victimes d’un climat trop sec pendant une grande partie du cycle. Par ailleurs, la demande industrielle reste forte, avec des marges de trituration élevées en raison des besoins accrus de l’UE en huile de colza. Enfin, le colza a été soutenu par la flambée du soja à la suite des importations records de la Chine. Cette dernière a asséché les réserves brésiliennes et fait exploser les exportations américaines. En outre, depuis septembre, un temps trop sec pour le soja en Amérique du Sud suscite des inquiétudes pour les récoltes 2021.
Hausse des besoins en huile à court et moyen terme
Cette tendance haussière du colza va-t-elle se poursuivre ? Actuellement, les besoins en biodiesel de colza sont intenses en raison de l’arrivée des températures négatives (ce biodiesel convient bien aux moteurs en hiver). Par ailleurs, en France et dans d’autres pays de l’UE, les volumes obligatoires à incorporer par les pétroliers doivent être respectés en année calendaire. L’approche du 31 décembre entraîne donc une accélération des achats de biodiesel.
À moyen terme, les besoins en biodiesel à base d’huile de colza vont encore s’accroître. D’une part, les taux obligatoires d’incorporation des biocarburants monteront dans plusieurs pays au 1er janvier 2021 (France, Pays-Bas, Belgique, Pologne, Hongrie et Espagne). D’autre part, la France a décidé de fortement restreindre la consommation d’huile de soja pour la production de biodiesel dès 2021. C’est donc l’huile de colza qui couvrira une grande partie de la hausse des besoins industriels sur les prochains mois. Enfin, le déficit en huile de tournesol, découlant de récoltes décevantes en mer Noire, la rend extrêmement chère. La demande alimentaire en huile de colza devrait en bénéficier, ce qui fera chuter les stocks d’huiles et de graines et – encore – grimper les prix sur les prochains mois.
Hémeline Macret - Tallage/Stratégie Grains
Des perspectives encore tendues en 2021-2022
La production de colza de l’Union européenne ne devrait se rétablir que modérément en 2021 en raison de la faible progression des surfaces.
Un temps trop sec a encore pénalisé les semis en France et en Bulgarie cet été. La surface remonte en revanche en Allemagne et en Roumanie. Dans l’UE, elle devrait stagner, et la production augmenter de 1 million de tonnes environ.
Avec de faibles stocks de départ et une demande industrielle en colza toujours croissante, la situation de l’UE en 2021-2022 pourrait rester déficitaire, et donc soutenir une nouvelle fois les prix l’hiver prochain.