« Malgré un marché qui reste très important, alimenté notamment par les agriculteurs en difficulté contraints à vendre leurs terres, nous constatons une stagnation du prix du foncier en 2016 », a indiqué Emmanuel Hyest, le président de la FNSafer à l’occasion de la présentation des chiffres des marchés fonciers ruraux, le 30 mai 2017, à Paris. En 2016, en moyenne, au niveau national, un hectare de terres et de prés libres a été négocié à 6 030 € ; soit une légère augmentation de 0,4 %.

Stagnation du prix des terres achetées

« Nous avons connu des augmentations beaucoup plus fortes ces dernières années : 6,2 % en 2013, 2,9 % en 2014, et 1,6 % en 2015. Nous avons un arrêt de la hausse, voire une stabilisation du prix. Et nous pouvons dire que la baisse des taux d’intérêt qui a continué en 2016 n’a pas suffi à contrecarrer l’effet de la baisse des revenus agricoles de 2015 et 2016 », a expliqué Robert Lévesque, directeur de Terres d’Europe-Scafr, bureau d’études spécialisé sur les questions foncières

Le prix des terres louées augmente

La hausse du prix des terres et des prés loués est en revanche plus marquée qu’en 2015, avec une augmentation de 1,9 % en 2016 (contre 1,4 % en 2015). Le prix moyen s’établit à 4 550 €/ha. « En 2016, le prix des terres louées a augmenté plus vite que le prix des terres libres. Le phénomène est nouveau : depuis 1995, le prix des terres libres avait toujours augmenté plus vite que le prix des terres louées », a poursuivi Robert Lévesque.

De nouveaux acquéreurs

Du côté des acquéreurs, même si le capital d’exploitation appartient très majoritairement aux agriculteurs, – des personnes physiques qui travaillent sur des exploitations agricoles –, la FNSafer constate une émergence de grandes sociétés d’exploitation qui sont financées par des détenteurs qui ne prennent pas part aux travaux agricoles.

Les SCEA et SA ont ainsi presque doublé leur surface d’exploitation entre 2000 et 2013. Elles exploitaient 6,5 % des surfaces en 2000, 11,3 % en 2013. « Dans ces SCEA et SA, il y a des personnes non agricoles qui prennent des parts sociales. Cela signifie que dans ces sociétés, on a des non-agriculteurs qui détiennent du capital pour percevoir un revenu, mais qui ne participent pas aux travaux d’exploitation, contrairement à ce qui se passe dans les exploitations individuelles et les Gaec. »

Les exploitations individuelles ont en revanche vu leur surface diminuer de façon très importante : elles exploitaient 58 % des surfaces en 2000 et 38 % en 2013. Les Gaec se stabilisent, quant à eux, autour du cinquième de la surface agricole, les EARL unipersonnelles correspondent à 15 % et les EARL avec plusieurs coexploitants continuent de voir leur surface augmentée (7,7 % en 2000 contre 14,8 % en 2013).

Une régulation indispensable

« La part prépondérante des sociétés n’est pas un mal en soi, a précisé Emmanuel Hyest. Ça a permis depuis de nombreuses années l’installation progressive des jeunes agriculteurs, en limitant leurs coûts au démarrage. Mais malheureusement, comme souvent, d’une bonne idée vertueuse, des gens profitent des failles et se servent aujourd’hui de ces sociétés pour aller vers l’accaparement. Il y a une concentration forte qui se fait aujourd’hui en France de façon directe ou indirecte à travers ces sociétés agricoles. »

Le président de la FNSafer plaide en faveur de nouveaux outils de régulation « pour une agriculture familiale, gérée par les agriculteurs en termes de capitaux et de travail fourni ».

R.A.