« Les agriculteurs ukrainiens espèrent semer sur 60 à 70 % des terrains agricoles, a déclaré Mariia Dudikh, directrice du Forum national agraire ukrainien, collectif qui regroupe cinq syndicats agricoles. C’est un pronostic optimiste. Il s’agit plutôt de 50 % des territoires si on est réaliste. ». Mariia Dudikh intervenait en visioconférence le 29 mars 2022 lors du congrès de la FNSEA organisée à Besançon (Doubs).

 

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« Les troupes russes pilonnent les fermes »

L’émotion dans la voix, Mariia Dudikh a témoigné de la situation vécue par les agriculteurs ukrainiens. « Les troupes russes pilonnent les fermes, tirent sur les machines agricoles, les fermiers, les paysans, décrit-elle. 500 km de front traversent les zones rurales rendant les travaux de semis très dangereux, voire impossible. Les fermiers participent au combat et sortent le soir et la nuit pour travailler leurs parcelles et semer. »

 

Malgré un accès entravé au fioul, au carburant et aux fonds de roulement, certaines solutions ont été trouvées mais elles sont mises à mal par les attaques de l’armée russe. « La Russie bombarde depuis quelques jours les entrepôts et les hangars de stockage de carburant. On sait qu’ils le font exprès car ils le font sur tout le territoire », a ajouté la directrice de l’organisation.

 

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« On espère atteindre 20 % de notre export »

L’Ukraine tente aussi de trouver des solutions pour pouvoir exporter de nouveau après l’indisponibilité des voies maritimes contrôlées par la Russie. « Grâce à l’effort du gouvernement, du business ukrainien et des opérateurs internationaux, cet export se réoriente », a décrit Mariia Dudikh.

 

Les voies ferroviaires sont mobilisées, mais ne couvriront que 20 % des volumes exportés. Une situation qui reste fragile et qui peut évoluer dans l’heure en fonction de l’évolution du conflit, note Mariia Dudikh. Et d’ajouter que « 400 millions de personnes dépendant de la production ukrainienne » pour se nourrir.

 

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« La situation est catastrophique pour l’élevage »

Si le travail des terres ukrainiennes reste entouré de graves incertitudes, la situation des élevages ukrainiens est « catastrophique », selon la directrice du Forum national agraire ukrainien.

 

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« Pour les vaches laitières, il y a des aliments disponibles, mais on ne peut pas les transporter vers les zones occupées, détaille-t-elle. Il y a aussi des problèmes de commercialisation car les entreprises du secteur sont bloquées, ou détruites. »

 

La situation est aussi très difficile pour les éleveurs de porcs et de volailles. « Nous connaissons une entreprise près de Kherson où toutes les volailles sont mortes par manque d’aliments », a témoigné Mariia Dudikh.

Les semenciers français pointés du doigt

Mariia Dudikh a conclu son témoignage en emboîtant le pas du président ukrainien Volodymyr Zelensky qui appelait devant les parlementaires français le 23 mars 2022, à ce que des entreprises françaises cessent de commercer avec la Russie. Mariia Dudikh a appelé « les fermiers français » à soutenir le peuple ukrainien en « arrêtant tout commerce avec les opérateurs russes ».

 

Elle a regretté que des entreprises dans le secteur des semences continuent de commercer avec la Fédération de Russie. Des entreprises où « les fermiers français ont des parts sociales », a-t-elle souligné. Un échange qu’elle a conclu en larmes sous les applaudissements émus des congressistes.