«Les traitements contre les strongles ne doivent surtout pas être systématiques », insiste Laurent Saboureau, vétérinaire spécialisé en production ovine (1). Sinon, c’est la porte ouverte aux parasites résistants aux produits de traitement. Et lorsque les strongles, en particulier, ne sont plus sensibles à un produit, c’est le cas pour tous les produits de la famille (voir l’infographie.)
1. Les médicaments disponibles
« Il existe cinq familles de matières actives différentes, poursuit Laurent Saboureau. Les benzimidazoles sont les plus anciens. Des études montrent qu’ils ont perdu beaucoup de leur efficacité dans un grand nombre d’exploitations. Une baisse d’efficience peut aussi être observée pour les imidazothiazoles, les lactones macrocycliques ou les salicylanilides. En cas de doute sur l’action de l’un d’eux, un test peut être réalisé avec son vétérinaire. » (Lire l’encadré). À noter que le monépantel, récemment apparu sur le marché, conserve tous ses pouvoirs. « Il est essentiel de prendre des précautions d’utilisation pour préserver son efficience le plus longtemps possible », assure le spécialiste.
2. Tenir compte de la coprologie
Le bon moment pour traiter se détermine en tenant compte de nombreux signes d’alerte, comme la réduction de croissance ou de la production laitière. L’anémie ou la baisse d’état général sont aussi des indices motivant la réalisation d’une coproscopie (2), pour confirmer ou non la présence des parasites. « Il ne faut en aucun cas profiter de la tonte ou d’une autre intervention pour traiter », souligne le praticien.
3. Traiter avec rigueur
Vérifier la posologie sur la notice des médicaments fait partie des mesures incontournables. Il convient de se baser sur l’animal le plus lourd pour déterminer la dose. « Attention, une brebis en fin de gestation, par exemple, pèse souvent plus de 90 kg », observe Laurent Saboureau. Le mieux est de peser les animaux. Il ne faut pas mélanger différents produits et bien agiter ceux en suspension avant de les administrer, sinon le traitement ne sera pas homogène », ajoute-t-il. Comme les pistolets doseurs ont tendance à se dérégler, il est prudent de prévoir un contrôle de la dose délivrée avec de l’eau et un bécher gradué.
4. Garder des animaux refuges
Alterner les familles de molécules au fil des traitements repousse l’installation des parasites résistants dans les parcelles. La stratégie peut être décidée avec son vétérinaire en fonction des autres parasites présents. « Les traitements détruisent les parasites adultes, mais les brebis ou les agneaux continuent d’émettre des œufs, c’est pourquoi il vaut mieux maintenir les animaux dans la parcelle où ils étaient pendant quelques jours avant de les déplacer », explique Laurent Saboureau.
Il ne faut pas chercher à éliminer tous les parasites non plus. Garder des ovins refuges que l’on ne traite pas permet de conserver une population de strongles sensibles. Tous les animaux ne réagissent pas de la même manière face au parasitisme. Certains sont plus résilients que d’autres. L’œil aguerri de l’éleveur ainsi que celui du vétérinaire sont mis à contribution pour choisir ceux qui ne seront pas traités. Des études sont en cours pour mieux cerner cette pratique. M.-F. M.
(1) Le 25 juin, lors d’un webinaire organisé par Cap filières Centre-Val de Loire.
(2) La France agricole n° 3911 du 2 juillet 2021, p. 27 et La France agricole n° 3658 du 1er septembre 2016.