Si les pays du Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay) restent dans le top dix mondial des exportateurs de viande bovine, les crises économique et sanitaire ont fragilisé leur commerce.
« La suspension des exportations de viande bovine à la mi-mai 2021 par le gouvernement argentin, dans l’espoir de contenir la flambée des prix sur son marché intérieur, en est un exemple marquant », indique Baptiste Buczinski, économiste à l’Institut de l’élevage (Idele) à l’occasion d’un webinaire sur les marchés mondiaux de la viande le 8 juin 2021.
En plus d’une économie et d’une consommation intérieure plombées par le Covid-19 en 2020, certaines zones de production du Mercosur ont été ébranlées par le manque d’eau. Au Brésil par exemple, même si la part d’animaux finis en feedlots progresse, « 50 % des bovins sont engraissés exclusivement à l’herbe, et donc dépendants des disponibilités en pâturage », relève Denise Zucato, du groupe brésilien Agropecuária Vila Rica.
La production abattue plafonne
Le Brésil, l’Argentine, l’Uruguay et le Paraguay ont produit à eux seuls près de 13 millions de tonnes-équivalent carcasse (tec) en 2020, soit un quart de la production mondiale de viande bovine. Pour autant, le nombre de bovins abattus au sein de ces quatre pays plafonne (–2 % par rapport à 2019).
Au Brésil, « les abattages, établis à 8,8 millions de tec l’an passé, ont baissé dans toutes les catégories », reprend Baptiste Buczinski. En Argentine, la hausse de la production abattue reste limitée : 3,1 millions de tec en 2020, soit +1 % par rapport à 2019.
La Chine conforte sa position de premier importateur
Sur l’échiquier mondial, « les exportations en provenance du Mercosur ont globalement baissé en 2020, hormis vers l’Amérique du Sud, l’Amérique du Nord, la Chine et Hong Kong », détaille Baptiste Buczinski. L’empire du Milieu a absorbé près de 2 250 000 tec, soit 25 % de plus qu’en 2019.

« La Chine a pris une place centrale dans les échanges internationaux, après la peste porcine africaine, rapporte l’intervenante brésilienne Denise Zucato. Il reste à savoir si cet appétit chinois pour la viande bovine sud-américaine va perdurer dans le temps, alors que le pays commence à recapitaliser son cheptel porcin. »
Des prix toujours incitatifs mais moins compétitifs
En 2020, si les volumes exportés depuis le Mercosur ont atteint un nouveau record, le début de 2021 s’annonce moins propice. Sur les cinq premiers mois de l’année, les exportations brésiliennes ont reflué de 3 % par rapport à 2020, y compris vers la Chine (–8 %).
« Au premier semestre, la production abattue s’est repliée de 1 %, un plancher historique plus atteint depuis 2009 qui contribue à limiter l’activité d’exportation », ajoute Baptiste Buczinski.
A contrario, les envois argentins ont été dynamiques jusqu’à la mise en œuvre des mesures gouvernementales. Sur le premier trimestre de 2021, ils augmentaient de 17 % par rapport à 2020 et ce, malgré des disponibilités limitées. « En Uruguay et au Paraguay, la fin du cycle de recapitalisation du cheptel devrait permettre des échanges suivis », souligne l’expert de l’Idele.
Les divers aléas économiques et politiques rendent les perspectives encore floues mais « l’inflation des prix dans chacun des pays du Mercosur oriente les cours de la viande bovine, convertis en dollars ou en euros, à la hausse depuis le début de l’année 2021, ce qui rend la marchandise moins compétitive dans les échanges internationaux », analyse Baptiste Buczinski.
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