«Ce que Napoléon a fait avec la betterave sucrière au XIXe siècle pour contourner le blocus anglais de la canne à sucre, nous le ferons pour remplacer le maïs ensilage », plaisante Jean-Benoît Tierny, de la société Ecopsi, à propos du Betador, un nouveau procédé d’ensilage de betterave pour les ruminants qu’il a mis au point. Derrière la boutade, se cache néanmoins une promesse ; celle d’une petite révolution fourragère.

La betterave fourragère ou sucrière est trop sucrée pour être ingérée en grande quantité par les ruminants. Le procédé consiste à en extraire un jus sucré, tout en y laissant une part significative destinée à assurer les besoins en énergie des vaches. Le « Betador » ainsi obtenu est un aliment riche en énergie puisqu’il affiche 1,4 UFL. Il est destiné à être introduit dans les rations en remplacement du maïs ensilage, et complété avec de la paille et un correcteur azoté. De plus, de par sa richesse en cellulose, « il donne toute latitude pour travailler les différentes formes d’azote soluble dans la ration et réduire les quantités de tourteaux », précise Jean-Benoît Tierny.

Simplification de la ration, amélioration des taux protéique et butyreux, meilleure fermentation ruminale avec valorisation de la cellulose, constance du produit dans le temps et moindres pertes au stockage… Les promesses sont nombreuses. Auxquelles s’ajoute une productivité élevée qui libère des surfaces pour les cultures de vente : « 1 ha de betterave permet de produire environ 20 tonnes de matière sèche (MS), dont 10 tonnes de sucre et 10 tonnes de Betador », confirme Jean-Benoît Tierny.

Étape industrielle

Le procédé, testé depuis cinq ans, est aujourd’hui au point. Mais la filière reste à construire. Contrairement au maïs fourrage, l’ensilage de betterave nécessite une étape industrielle d’extraction de sucre, hors de l’élevage. Jean-Benoît Tierny cherche aujourd’hui des partenaires via les coopératives, les négoces, les Cuma, etc., pour monter des unités de production, et il a bon espoir.

« Le prix d’intérêt du Betador en élevage laitier est d’environ 60-65 €/t, tandis que le prix de revient d’une tonne de betterave « en bord de champs » est de 20 €/t. Cela laisse 40-45 €/t pour trouver un modèle économique qui finance une unité industrielle et le transport. C’est tout à fait faisable, sans compter que la valorisation des jus sucrés, en méthanisation ou directement auprès des sucreries, sera aussi une composante du prix de revient de ce fourrage. »