À Fay-de-Bretagne, en Loire-Atlantique, Véronique et Philippe Guitton sont passés en monotraite depuis fin mars, après une demande de Biolait, leur collecteur, au vu des tensions liées au Covid-19. Pour les deux éleveurs bio, ce n’est pas une nouveauté : en monotraite le dimanche depuis plus de vingt-cinq ans, ils la pratiquent sur plusieurs mois depuis 2017, repassant ensuite à deux traites par jour sans problèmes particuliers.
L’exploitation, en bio depuis 2009, compte 80 vaches laitières de races prim’holstein et brune des Alpes, pures et croisées, avec des apports de jersiaise, de montbéliarde et un peu de pie rouge de Norvège. Soixante-quatre vaches sont traites, le reste du troupeau sert de nourrices. Sur les 115 ha de SAU, 7 ha sont cette année en maïs et orge de printemps, le reste en herbe. Autosuffisants, ils n’achètent pas d’aliment.
Le premier passage en monotraite date de mi-juillet 2017, avec l’appui du Civam 44. « Nous avions vu des éleveurs avec des systèmes viables, nous voulions essayer car nous avons un îlot éloigné pâturé en été. Et deux heures de marche par jour fatiguent les animaux », explique Véronique Guitton. Au bout de deux mois, le taux de cellules augmente, ils reprennent donc deux traites et le problème se règle. Ils réitèrent en 2018 sur cinq mois et, en 2019, c’est Biolait qui demande une baisse de production (lire l’encadré). La monotraite est mise en place d’avril à juillet, puis de fin octobre à mi-décembre, en fonction des taux de cellules, de la nourriture disponible et des congés.
TB et TP plus élevés
Ils estiment une perte de 25 à 30 % du volume de lait par vache en passant de deux traites à une seule. En 2017, les vaches sont-elles revenues à leur volume initial en repassant à deux traites ? « Non, mais c’est difficile à chiffrer car l’herbe pousse moins en septembre », évalue Véronique Guitton. Les taux sont plutôt meilleurs en monotraite : en mai 2019, le taux butyreux était de 42,6 g/kg et le taux protéique de 34,5, contre 39 et 31 en mai 2018, offrant un meilleur prix : 30 centimes/litre en plus. Au global, leur volume annuel de lait a baissé au cours des dernières années : 303 000 l en 2017, 267 000 l en 2018 et 280 000 l en 2019, mais l’EBE se maintient. Avec les primes et les compléments de prix pour la baisse de production et les bons taux, ils ont été rémunérés 500 €/1 000 l en 2019. Quant aux taux cellulaires, ils sont meilleurs chaque année.
Des animaux en bon état
Les deux éleveurs sont très satisfaits de la monotraite : les vaches sont en état, la fertilité très bonne et ils n’ont pas eu de problème de comportement ou de mammites. « C’est souple, on peut faire marche arrière quand on veut. Après, c’est un système global d’exploitation, avec la valorisation de l’herbe, et il faut vraiment partir d’un troupeau sain », ajoute Véronique Guitton. « Il faut être régulier sur l’heure et très vigilant et méticuleux sur l’unique traite de la journée pour ne rien laisser passer », conseille Philippe Guitton.
Marion Coisne