L’arrivée des loups représente une source d’inquiétude importante sur les fronts de colonisation. Dans le Limousin, où l’élevage occupe une place prépondérante avec 436 000 bovins et 294 000 ovins, la préoccupation est grande. Pour anticiper l’arrivée du prédateur, les préfets des trois départements (Creuse, Corrèze et Haute-Vienne), avec la Draaf de Nouvelle-Aquitaine, ont missionné l’Institut de l’élevage pour étudier la vulnérabilité des systèmes d’élevage dans la zone.

Le Limousin : un écosystème favorable à l’installation du loup

« Le Limousin bénéficie, en effet, d’un écosystème favorable à l’installation des prédateurs, observe Christine Moulin, de l’Institut de l’élevage, qui a conduit l’étude. Si personne ne conteste que l’arrivée des loups bouscule, voire menace le territoire du Limousin, les solutions ne sont pas évidentes. » La protection n’est que partiellement possible avec les seuls outils préconisés par le plan loup. « Leur adaptation aux systèmes de la zone bocagère a été étudiée, en partenariat avec les ingénieurs du réseau Inosys des trois chambres d’agriculture, au travers de sept cas types représentatifs des systèmes du Limousin », précise Christine Moulin.

Les stratégies modélisées varient en fonction de la production. Pour les éleveurs ovins, l’axe de protection principal repose sur l’emploi des chiens de protection et le renforcement des clôtures. La modification de la conduite en diminuant le nombre de lots au pâturage arrive en second. En élevage bovins, espèce reconnue non protégeable, la stratégie retenue dans les simulations pour l’ensemble des systèmes consiste à ne plus exposer les jeunes veaux de moins de quatre mois. À l’échelle des exploitations types, ces stratégies représentent des coûts allant de 7 000 à 29 000 €/an, sans compter les aides et les subventions liées à la protection des troupeaux et hors indemnisation des pertes en cas de prédation avérée.

Les moyens de protection disponibles ayant été développés dans des zones d’élevage pastoral, ils ne sont pas nécessairement transposables aux autres systèmes fourragers. L’Institut de l’élevage propose de développer des actions innovantes et des expérimentations, notamment en ce qui concerne l’utilisation des chiens de protection.

Un chien pour protéger les bovins ?

Ces pistes de travail devront s’attacher à répondre aux questions suivantes : Est-il possible de protéger simultanément plusieurs lots et/ou un groupe de parcelles avec un même chien ? Un même chien peut-il travailler pour plusieurs éleveurs ? Les chiens peuvent-ils s’adapter aux réallotement incessants des ovins souvent pratiqués en Limousin, alors que dans les Alpes, ils sont souvent affectés à un même lot d’animaux (pour toute leur vie) ? Les troupeaux de bovins peuvent-ils être efficacement protégés par un chien ? Est-il envisageable d’éduquer les brebis des troupeaux voisins à la présence de chiens de protection « étrangers » travaillant à proximité immédiate ? Idem pour les bovins ? Beaucoup de travail, donc, en perspective pour adapter les patous et autres races disponibles aux élevages des milieux bocagers.

Marie-France Malterre