En France, le troupeau moyen de chèvres laitières conduites en bio est de 70 têtes, soit deux fois moins qu’à l’EARL les Deux rivières, dans les Deux-Sèvres. « Dans notre groupe de pâturants, le parasitisme et le changement climatique sont les plus gros freins à la conversion en agriculture biologique, rapporte Christelle Hameury. Au naturel, la chèvre est une cueilleuse, ce qui explique qu’elle soit peu immunisée face aux strongles gastro-intestinaux au sol. »
Contrer le parasitisme
En bio, seuls les traitements curatifs sont autorisés. Certaines astuces permettent d’en prévenir l’utilisation : le pâturage des haies ; la sortie des chevrettes dès trois mois ; la sélection des boucs sur les meilleures lignées de pâturants bio ; un pâturage tournant dynamique, avec fil avant et arrière pour éviter la fréquentation de parcs souillés ; une hauteur d’herbe minimum de 7 cm en sortie ; des fauches régulières ; l’absence de prairies permanentes et un faible chargement des parcelles comme du bâtiment (220 places).
Les producteurs réalisent jusqu’à sept coproscopies par an. Les primipares et les hautes productrices, plus fragiles, sont particulièrement suivies. « Nous participons, avec le Civam, à une étude visant à évaluer l’efficacité du pâturage des plantes à tanin et aromatiques pour déloger les strongles via une variation de pH du tube digestif (1) », ajoute Christelle. Cependant, l’élevage déplore un pic d’infestation annuel fin juin, période où les chèvres doivent raser le sol pour trouver les jeunes pousses. Une petite quarantaine d’animaux sont traités. Pour Laurent Couilleau, son associé, « cibler le traitement permet d’en limiter la résistance ».
Du lait toute l’année
Le désaisonnement de 60 laitières permet d’assurer la fourniture de l’atelier de transformation toute l’année. Les hormones étant interdites en bio, un traitement photopériodique leur est appliqué. « En décembre et janvier, des tubes néons les éclairent de 6 h à 22 h, afin de simuler les jours longs, explique l’éleveuse. L’éclairement est de 200 lux au niveau des yeux. En février, les jours courts déclenchent les chaleurs. Les boucs font le reste. » Seules quelques chevrettes au petit gabarit, de moins de 35 kg, se décalent et rejoignent le second lot.
Au tarissement, aucun traitement n’est administré. C’est un atout certain car les délais d’attente sont doublés en bio. « On ne voit pas souvent le vétérinaire », assure Christelle. « La rareté des produits caprins fait que les éleveurs sont habitués à faire l’impasse, ajoute son associé. La réforme et la sélection naturelle prennent souvent le relais. »
L’augmentation du cheptel n’est pas à l’ordre du jour. « Il faut donner la priorité à l’autonomie alimentaire, notamment en vue du réchauffement climatique, et au moindre chargement des parcelles en raison du parasitisme, conclut Laurent. Plus de lait avec plus de concentrés, ce n’est ni éthique ni pérenne. »
A. Courty
(1) Casdar Fastoche sur les alternatives aux vermifuges.
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