L’expertise, dévoilée par l’institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement, sur la maîtrise de la qualité des aliments d’origine animale aspire à la « responsabilisation des professionnels, a estimé Bruno Ferreira, le directeur général de l’alimentation au ministère de l’Agriculture. Chacun peut agir à son échelle », a-t-il ajouté lors d’une visioconférence organisée le 29 mai 2020.

Une qualité multifacettes

20 scientifiques ont travaillé sur cette expertise, rassemblant et analysant les résultats de 3 500 publications internationales. Ils ont mis en lumière sept propriétés constitutives de la qualité :

    Organoleptique (couleur, texture, flaveur, jutosité, odeur) ;Technologique (aptitude à la transformation/conservation, rendements après traitements) ;Commerciale (format, poids, calibrage, approvisionnement régulier) ;Nutritionnelle (composition) ;Image (éthique, conditions d’élevage, environnement, revenu du producteur, provenance) ;Usage (praticité, facilité de stockage, emballage) ;Sanitaire (contaminations, additifs, effets sur la santé humaine).

 

Dans les élevages, l’alimentation des animaux est particulièrement déterminante car ce facteur joue fortement sur les propriétés commerciales, technologiques, organoleptiques et nutritionnelles. L’image et la qualité sanitaire du produit viennent ensuite. À titre d’exemple, l’alimentation à l’herbe est plus riche en oméga 3 et antioxydants, livrant des produits finaux « sains et typés ». L’utilisation de graines de lin permet également de jouer sur l’équilibre entre oméga 6 (acide linolénique saturé) et oméga 3 (acide alpha-linolénique insaturé). L’image du produit s’en voit également améliorée (naturalité).

 

L’utilisation d’antibiotiques et l’hygiène du site impactent la qualité sanitaire du produit, tandis que le bien-être animal (mutilations, densité) joue notamment sur son image. De son côté, la génétique (race, souche) influence logiquement les propriétés commerciales et technologiques, mais aussi organoleptiques, nutritionnelles et d’image.

« Une alchimie complexe » entre l’élevage et l’aval

Bien que la phase d’élevage soit décisive, la qualité du produit final dépend également de ses modalités de transformation et de distribution. Ainsi, sur l’exemple des fromages au lait cru, le transport du lait et les mélanges faits en laiterie jouent à nouveau sur cinq des sept propriétés. Ajoutés à cela, les processus de fabrication, d’affinage et de conditionnement, l’ensemble des propriétés sont affectées. De quoi ancrer ou défaire le travail des éleveurs.

 

« La plupart des signes officiels de qualité (Siqo) s’appuient sur cette synergie entre élevage et transformation », note l’Inrae. En label rouge, la priorité est donnée à la qualité organoleptique du produit (choix de la race, maturation de la viande). Les appellations d’origine jouent également sur cette différentiation, avec la typicité en bonus. En bio, c’est l’image du produit qui est mise en avant, via une obligation de moyens plus que de résultats.

Trouver des compromis

Il est parfois difficile de conjuguer l’ensemble des propriétés constitutives de la qualité des aliments. En pratique, les propriétés commerciales prennent souvent le pas sur le reste. « La sélection génétique d’espèces pour leur masse musculaire (poulets, porcs, poissons) se fait souvent au détriment de leurs propriétés organoleptiques, avec des anomalies des tissus musculaires », illustre l’Inrae.

 

Dans les filières avicole et laitière, le devenir des jeunes mâles pose également question : commerce contre éthique. Le sexage in ovo et le recours aux races mixtes sont autant de solutions envisagées. La production de mâles entiers en production porcine, pratique éthique, risque se faire au détriment du goût du produit final. L’immunocastration, la sélection génétique (androsténone) ou la réduction de l’âge à l’abattage sont des compromis.

 

> À lire aussi :Porcs, les vétos encouragent l’élevage de mâles entiers (29/04/2020)