Peut-on aller jusqu’à insulter, dénigrer, s’introduire dans les fermes et commettre des exactions au nom d’une cause que l’on estime juste ? C’est finalement la question de fond, pendante, qui apparaît en filigrane derrière l’actualité judiciaire des dernières semaines. Coup sur coup, la justice vient en effet de se pencher sur deux dossiers qui ont une résonance entre eux puisque les antispécistes jugés au Mans le 28 janvier (lire page 14) ont justement été identifiés grâce aux investigations de la cellule Demeter de la gendarmerie. Or, cette cellule qui existe depuis 2019 pour lutter contre la délinquance dans le monde agricole va devoir cesser ses activités de prévention des « actions de nature idéologique » et par conséquent revoir son périmètre d’intervention. Cela fait suite à une décision du tribunal administratif de Paris le 2 février (lire page 26). Plusieurs ONG, dont l’association antispéciste L214, l’avaient en effet attaquée, dénonçant « de graves atteintes à la liberté d’expression ».
Cela ne manque pas de sel de faire ainsi appel au droit quand on connaît les méthodes récurrentes de cette association qui s’est fait une spécialité de s’introduire dans les propriétés privées et de flirter avec les limites ! Plus largement, pour se rendre compte de quoi sont capables ces milieux antispécistes et anti-élevage, il est intéressant d’examiner ce qui s’est passé au Mans, à la fois dans le tribunal et autour. En cela, la vidéo postée par l’éleveur Étienne Fourmont, partie civile à ce procès après intrusion dans sa ferme, est particulièrement instructive (1). On y entend une horde d’activistes injurier copieusement la présidente de la FNSEA venue soutenir les victimes, pendant qu’à l’intérieur les suspects tentent de se faire passer pour des enfants de chœur, n’assumant rien des faits reprochés et de leur préméditation pour éviter la qualification « d’association de malfaiteurs » et la prison potentielle qui va avec. De « grandes gueules » mais visiblement à géométrie variable…
Alors que le jugement a été mis en délibéré jusqu’au 31 mars, c’est de la prison avec sursis qui a été requise par le procureur à l’encontre de certains prévenus. La peine prononcée sera de toute évidence un signal important pour la suite.
Ce, d’autant plus que la justice vient, par ailleurs, de revenir en arrière le 2 février, en cassation, en annulant une précédente condamnation du collectif anti-spéciste DXE qui s’était introduit chez un éleveur de porc. La Cour a estimé que le droit d’informer n’avait pas été suffisamment pris en compte précédemment, au profit du droit de propriété.
On voit bien que la justice française peine à se positionner vis-à-vis des activistes anti-élevage… C’est d’autant plus inquiétant que la surveillance de ces militants potentiellement violents ne va plus être possible via la cellule qui en était chargée. À moins que le ministère de l’Intérieur n’ait pas dit son dernier mot et revienne avec un dispositif mieux assis sur le droit ?