Faute avouée, à moitié pardonnée ? Pas si sûr ici… Dans son interview tonitruante au Parisien sur les non-vaccinés, le président de la République, Emmanuel Macron, s’est aussi livré à un mea culpa sur la promesse non tenue de sortie du glyphosate en trois ans. « C’est l’erreur que j’ai commise en début de quinquennat : il faut agir sur ces sujets au niveau européen. Cela ne marche pas si on le fait tout seul. »

Comment une telle évidence a-t-elle pu lui échapper au moment d’écrire en novembre 2017 son fameux tweet impulsif annonçant l’interdiction de l’herbicide « au plus tard dans trois ans » ? Lui, l’Européen convaincu, ne pouvait ignorer que les agriculteurs français opèrent dans un marché concurrentiel ouvert au sein de l’UE et que ce genre de décision unilatérale concernant une molécule-clé créerait des distorsions. « Certains agriculteurs m’ont dit que si on les obligeait à sortir rapidement, ils allaient mettre la clé sous la porte, parce que leurs concurrents espagnols ou italiens, eux, pouvaient continuer à produire », a ajouté le chef de l’État dans un truisme confondant. Alors que notre pays est embourbé dans ce dossier depuis près de cinq ans, qu’une énergie folle aura été dépensée sur cette question (rapport Inra, mission parlementaire de sortie du glyphosate, etc.), on aura au moins appris une chose lors de ces investigations : rien que pour les grandes cultures, la douloureuse est estimée entre 50 et 150 euros par hectare. Les pouvoirs publics auront également réalisé que l’arrêt du glyphosate signifierait la mort de la prometteuse agriculture de conservation (comme en témoigne cette semaine l’agricultrice Sarah Singla en page 15).

En fait, la réponse faite dans Le Parisien n’éclaire pas sur la doctrine future du chef de l’État. Va-t-il continuer à s’obstiner pour avoir la peau du glyphosate ? En l’occurrence, va-t-il profiter de la présidence française de l’UE pour porter une « initiative forte de sortie accélérée des pesticides », comme il l’a annoncé en septembre devant le congrès mondial de l’UICN (associations environnementales) ? S’il est encore aux commandes après les élections, se rangera-t-il à l’avis que remettra l’Efsa, l’autorité européenne de sécurité des aliments, ou conservera-t-il une position idéologique ? Sans préjuger de cet avis, on sait depuis juin dernier que les quatre agences sanitaires européennes (France, Hongrie, Pays-Bas, Suède) chargées du rapport de réévaluation (1) pour éclairer l’Efsa ont déjà formulé des conclusions nettes : le glyphosate n’est ni cancérogène, ni mutagène, ni reprotoxique. Alors que choisira-t-il : la science ou la démagogie ?

(1) L’actuelle autorisation européenne du glyphosate se termine fin décembre 2022.