« Nous avons une ambition commune : valoriser au mieux notre lait de montagne », annonce Mickaël Borel, éleveur de vaches laitières (abondances et monbéliardes) à Saint-Julien-en-Champsaur (Hautes-Alpes). Avec trois autres éleveurs laitiers, dont deux installés en Gaec, ils ont fait le pari de se regrouper avec une fromagère au sein d’une SAS pour transformer le produit de leurs fermes. La fromagère détient 1/5e des parts de la société. Elle en est également salariée. Les autres associés ont un nombre de parts proportionnel au volume produit par leur exploitation. « On ne peut pas tout faire, poursuit l’agriculteur. Nous n’avons ni la main-d’œuvre, ni les équipements pour faire du fromage. Nous préférons nous consacrer à notre cœur de métier, l’élevage. »
Valoriser le lait de montagne
En mai 2016, la fromagerie artisanale a vu le jour à La Fare-en-Champsaur. D’une superficie de 230 m2, elle comporte un atelier et une boutique de vente dans un bâtiment en location. « Nous avons trouvé un terrain d’entente avec l’entreprise qui collecte notre lait pour transformer une partie de notre production, souligne Yann Giraud, à la tête d’un troupeau de cinquante prim’holsteins, à Saint-Bonnet-en-Champsaur. La SAS achète le lait des quatre fermes. La structure transforme, aujourd’hui, le quart de la production des éleveurs, soit 250 000 litres. Les quantités vont crescendo : elles ont pratiquement doublé entre 2016 et 2020.
Créer une SAS
« L’été, la boutique marche fort, avec un flux de 100 à 150 visiteurs par jour, indique Delphine Soler, la fromagère. Nous sommes dans un département touristique et il y a une véritable demande pour des produits fermiers et locaux. » Le point de vente est le principal débouché, avec une poignée de magasins de producteurs des départements voisins. « Nous avons également une clientèle de restaurateurs et d’hébergeurs dans notre secteur qui sont des prescripteurs importants », complète Delphine Soler.
C’est elle qui effectue la collecte auprès des agriculteurs. « Je transforme le lait tous les jours en m’adaptant à la courbe de production des fermes. » Le prix payé est fixé à l’avance par le groupe. « Nous déterminons collectivement un tarif de base annuel qui est valorisé en fonction de la qualité du lait et de l’alimentation des vaches », précise-t-elle. Il est légèrement supérieur à celui payé par le collecteur, de l’ordre de 3 à 5 %.
Cinq salariées
Delphine Soler élabore plusieurs fromages, tous au lait cru : de la tomme, du bleu, des pâtes molles, de la tomme bio et sa spécialité, le goustarou, un fromage de 160 g frais et onctueux. La fourchette de prix ? Entre 13,70 et 17,50 €/kg. « Nous faisons aussi de l’achat-revente de fromages de chèvre et de brebis. » L’an passé, le collectif a décidé de s’équiper d’un distributeur automatique de fromages et de produits locaux pour réduire l’attente en magasin.
Au départ, la fromagerie fonctionnait avec la fromagère et une autre salariée. Elles sont aujourd’hui cinq, deux à temps plein et trois à temps partiel, affectées à la vente ou à la transformation. Suivant les résultats engrangés par la SAS, des primes peuvent être versées aux salariées et le prix du lait d’automne est majoré pour les producteurs, car plus difficile à produire à cette période en système de montagne.
Un investissement mesuré
Pour créer cette fromagerie, les cinq associés ont investi 160 000 euros HT. Les collectivités territoriales ont financé un quart de ce montant. « Nous avons notamment bénéficié d’une aide au démarrage des entreprises et à l’investissement sur le matériel neuf, indique Delphine Soler. Et de soutiens européens via le programme Leader. » Les quatre éleveurs ont réalisé eux-mêmes une partie des travaux d’aménagement de l’atelier et de la boutique. « Cela a permis de minimiser les coûts, souligne Yann Giraud. Cela a également renforcé l’esprit d’équipe au sein de notre groupe. »