La nouvelle a fait l’effet d’une petite bombe dans la région, le 14 février jour de la Saint-Valentin (1). Mais pourtant sur place, l’heure n’est pas aux oraisons funèbres après l’annonce de la fermeture programmée dès 2020, de la sucrerie de Cagny, qui fait partie du paysage local depuis l’après-guerre et assure de l’activité à plus de 1 000 planteurs et à plus de 2 000 salariés directs et indirects.

 

Car il semble inconcevable de se résigner à la « realpolitik » allemande du groupe Südzucker propriétaire de Saint Louis Sucre. « On ne peut pas nous annoncer qu’on va servir de variable d’ajustement, comme cela par simple communiqué de presse, sans concertation, sans plan d’accompagnement, proclamait Patrick Dechaufour, le président de la confédération générale des planteurs de betterave (CGB) du Calvados, de l’Orne et de la Sarthe, le 15 février. À mon sens rien n’est perdu, j’y crois et je suis même assez serein. En tout cas, nous nous battrons jusqu’au bout pour maintenir le bassin de production sous une forme ou sous une autre ».

Changement de main du site

En tout, 15 000 ha sont concernés par l’approvisionnement de Cagny, principalement dans le Calvados, l’Orne et l’Eure. Dans l’attente d’une réunion avec les dirigeants de Südzucker, ainsi qu’avec les personnalités politiques locales et nationales, Patrick Dechaufour laisse entendre que des contacts ont déjà été pris avec des partenaires potentiels de l’industrie agroalimentaire eux-mêmes décidés à vouloir pérenniser la production dans la région.

 

Le changement de main du site est une option qui n’est pas écartée pour l’instant. « Nous sommes prêts à envisager toutes les possibilités. Le feuilleton qui ne fait que commencer », annonce le représentant local.

Les planteurs sont « remontés comme des pendules »

Dans la plaine, à quelques semaines de sortir les semoirs à betterave, c’est le flou le plus complet et aussi la colère qui s’installe. L’heure n’en est pas encore au blocage de l’usine, mais les planteurs sont « remontés comme des pendules ».

 

« On nous prend vraiment pour des moins que rien, tempête l’un d’eux. Depuis des années, la sucrerie nous demande d’augmenter les surfaces et nous incite à investir et maintenant, elle nous tord le cou ». L’incompréhension est d’autant plus forte que les planteurs sont actifs sur de nombreux sujets techniques en lien avec la sucrerie.

 

Quelques jours plus tôt, mi-janvier, le directeur betteravier régional Normand de Saint Louis sucre, Philippe Simonin délivrait d’ailleurs un message plein d’espoir aux planteurs lors du comité technique à Cagny. Il semblait sincère et ne savait certainement rien lui-même des plans du groupe qui l’emploie.

 

(1) Le même jour, Saint Louis Sucre a annoncé également la fermeture de la sucrerie d’Eppeville (Somme)