Les commodités agricoles ont de nouveau suivi une tendance haussière cette semaine, à l’exception du maïs et du soja qui ont fait bande à part.

 

Les révisions en baisse de l’offre mondiale rendent les prix du blé nerveux

Dans la zone de la mer Noire et dans l’Union européenne, les prix ont continué de progresser au cours de la semaine écoulée, entre 10 et 18 $/t en fonction des places. Cependant, les prix ont été fébriles avec une nette baisse sur le début de la semaine, suivi d’un renchérissement encore plus important des cours au milieu de la semaine.

 

Le marché semble dans l’incertitude après l’annonce, la semaine dernière, par le ministère américain de l’Agriculture, l’USDA, d’une prévision très basse de la récolte russe. Les sources locales semblent maintenant penser que le très bas niveau de la prévision américaine n’est pas si fou. À cela s’ajoutent des échos de plus en plus alarmistes au Canada, où les prévisions de productions sont revues à la baisse au fil des semaines. Les rendements en blé pourraient être inférieurs de 25 % par rapport à la moyenne cinq ans du pays.

 

Malgré le haut niveau des prix, le marché a été actif avec des achats algérien et égyptien en blé meunier (respectivement pour 250 000 tonnes et 180 000 tonnes). Par rapport à son dernier achat datant du 4 août dernier, l’Algérie a dû débourser 27 $/t de plus cette semaine (à 349,5 $/t C&F) et l’Égypte a vu son prix d’achat augmenter de 37,5 $/t (à 331,5 $/t C&F).

 

Contrairement à l’année dernière, la Russie peine à capter la demande égyptienne en raison d’un manque de compétitivité des prix russes face aux autres origines de la mer Noire (+5 $/t par rapport à l’Ukraine). À titre indicatif, l’année dernière à la même date, l’origine russe représentait plus de 40 % des achats égyptiens, contre moins de 5 % cette année.

 

Pour le moment, les très bonnes conditions en Australie ne parviennent pas à calmer le marché, dans la mesure où le bilan mondial de blé est très tendu.

 

Le marché français est fébrile

En France, les moissons atteignent la dernière ligne droite, puisque 91 % des surfaces étaient récoltées au 16 août 2021. La moisson aura eu environ dix jours de retard par rapport à la moyenne de ces dernières années et même jusqu’à 14 jours par rapport à l’année dernière.

 

Les opérateurs s’attellent à évaluer la qualité des lots pour orienter les blés dans les silos et les acheteurs attendent les premières conclusions. S’il est acquis que les poids spécifiques sont petits, les autres critères technologiques restent à l’étude. Malgré tout, la situation est bien moins catastrophique qu’en 2014, lorsque les temps de chute de Hagberg étaient très bas, ce qui avait largement perturbé la campagne.

 

En Allemagne, la récolte a été revue en légère baisse par l’association des coopératives du pays. Le volume récolté chez nos voisins d’Outre-Rhin est prévu à un niveau inférieur à la moyenne de ces dernières années. Les pluies au cours des récoltes ont également engendré des problèmes de qualité (poids spécifiques et temps de chute de Hagberg). En Allemagne comme en France, une partie plus importante de la récolte devrait être déclassée en fourrager, par rapport à une année classique.

 

Le blé meunier rendu Rouen s’est renchéri de 16,25 €/t au cours de la semaine à 267,25 €/t (+39 €/t en quinze jours seulement), soit 319 $/t. En Russie et en Ukraine, les hausses sont moins fulgurantes qu’en France (respectivement +8 $/t, à 298 $/t, pour le blé à 12 % de protéines et +10 $/t, à 288 $/t, pour l’ukrainien à 11,5 %), mais restent conséquentes.

 

Les prix d’orge continuent leur escalade

À Rouen, l’orge fourragère a gagné 14,25 €/t, à 252,25 €/t en base juillet (+46 €/t au cours du mois !), tandis que sur la Moselle, la hausse est bien plus timide (+3 €/t, à 230 €/t).

 

Les ports français chargent actuellement 87 000 tonnes vers la Chine, et 250 00 tonnes supplémentaires devraient être chargées dans les tout prochains jours. La demande chinoise pourrait tout de même ralentir dans les prochaines semaines, puisque le pays a récemment annulé plusieurs bateaux en provenance de l’Ukraine. Cet événement n’a pas pour autant empêcher les prix ukrainiens de progresser dans des proportions similaires aux prix français, à 267,5 $/t (contre 300 $/t à Rouen), dans la mesure où la demande mondiale reste soutenue.

 

En effet, les mauvaises récoltes au Moyen-Orient et sur une partie du bassin méditerranéen engendrent une demande accrue de ces pays. C’est le cas de la Turquie dont la récolte a été fortement pénalisée par le temps sec. Le pays est d’ailleurs en train d’acheter au moins 250 000 tonnes d’orge fourragère. Au regard des prix évoqués, l’appel d’offres sera entièrement remporté par la mer Noire.

 

Au niveau mondial, la situation est très contrastée entre l’hémisphère Nord et l’hémisphère Sud. Au Canada, les prévisions sont de plus en plus mauvaises, à des niveaux extrêmement bas. Or le pays tient un rôle très important dans la satisfaction de la demande chinoise (premier fournisseur d’orge auprès de la Chine en 2020-2021). En Australie, la situation est tout autre puisque les conditions sont excellentes jusqu’à présent. Cependant, l’orge australienne est toujours pénalisée par Pékin d’une taxe de 80,5 %, rendant les flux entre les deux pays impossibles. Par conséquent, la France (comme l’Ukraine et l’Argentine) voit ses prix d’orge soutenus par la Chine.

 

Les prix brassicoles n’ont pas évolué cette semaine, les malteurs attendent les résultats sur la qualité des orges de printemps. L’orge de printemps Fob Creil est cotée à 260 €/t et l’orge d’hiver Fob Creil est cotée à 241 €/t.

Légère baisse des cours du maïs

Sur l’ancienne récolte, les prix du maïs en France n’ont pas évolué cette semaine, mais ont baissé sur la nouvelle récolte. En effet, le maïs Fob Bordeaux a perdu 4 €/t, à 223 €/t, et le Fob Rhin a perdu 5,5 €/t, à 232,5 €/t (base : juillet).

 

Les conditions climatiques dans l’hexagone continuent d’être propices aux maïs, et Céré’Obs indique que 91 % des surfaces se situaient dans un état bon à excellent au 16 août dernier (contre 62 % l’an dernier à la même date).

 

Les prix du maïs n’ont pas cédé à la pression haussière des autres céréales, au contraire. Les perspectives de production chez les autres producteurs mondiaux sont correctes, et surtout bien meilleures que l’an dernier. Les prix mondiaux ont d’ailleurs reculé chez l’ensemble des exportateurs de maïs, avec une baisse conséquente en Argentine cette semaine (–8 $/t, à 227 $/t). Le prix du maïs en Ukraine n’a pas suivi la tendance baissière des autres origines, mais a été reconduit d’une semaine sur l’autre à 267,5 $/t.

 

Le maïs français Fob Bordeaux de la récolte de 2021 est maintenant très légèrement moins cher que son homologue mer Noire (–2,5 $/t à 265 $/t). Aux États-Unis, les prix du maïs ont cédé 3 $/t, à 266 $/t. Les acteurs du marché sont dans l’attente des résultats du tour de plaine de Pro Farmer qui devrait se conclure ce jour. Les prix américains ont également été impactés par le renchérissement du dollar.

Le prix du colza en nouvelle progression

Le colza français est resté très soutenu par la fermeté des huiles végétales depuis la semaine dernière. Son prix a atteint des nouveaux records mardi avant d’entamer une correction à la baisse. Sur une semaine, les cours de colza étaient en hausse de 11,5 €/t, à 570 €/t, pour le Fob Moselle et de 4,5 €/t, à 561 €/t rendu Rouen. Sur Euronext, la hausse s’élève à 8 €/t, à 563 €/t, pour les contrats de novembre.

 

Le cours du colza a surtout suivi les mouvements de celui de l’huile de palme malaisien. Ce dernier a atteint des sommets au début de la semaine en raison d’une vive tension sur le marché. En effet, le rapport haussier du MPOB (Malaysian Palm Oil Board) paru la semaine dernière a continué de soutenir les cours. Selon le rapport, la production d’huile de palme en juillet était en baisse de plus de 5 % par rapport à juin. Le niveau de stocks à la fin de juillet était nettement inférieur aux attentes (en recul de 7,3 % sur un mois). En outre, les inquiétudes liées à l’impact de la propagation du variant Delta de la Covid-19 sur l’accès aux exploitations de palmiers à huile, et donc le niveau de production sur les prochains mois, ont contribué au renchérissement des prix.

 

D’autre part, le canola canadien continue d’intégrer les mauvaises perspectives de la récolte en cours. Les rendements devraient être pénalisés par la forte chaleur et le manque de précipitations, notamment sur le mois de juillet. À Winnipeg, le canola est coté à 712 $/t, en augmentation de 6 $/t d’une semaine sur l’autre.

Baisse du soja avec l’arrivée de la nouvelle récolte américaine

Les prix du soja américain de l’ancienne récolte ne sont plus cotés. Pour la nouvelle récolte, l’échéance de septembre s’échange désormais à 486 $/t. L’échéance de novembre, la plus échangée depuis plusieurs semaines, a perdu 8 $/t depuis la semaine dernière à 485 $/t, après une première quinzaine d’août haussière.

 

Cette baisse s’explique par de bonnes perspectives de productions aux États-Unis, renforcée par des prévisions météorologiques satisfaisantes pour les prochains jours. En effet, les cultures américaines devraient profiter de bonnes précipitations pour la fin du remplissage des gousses. Les feuilles des parcelles les plus avancées vont commencer à tomber dans les prochains jours, et les premiers travaux de récolte devraient débuter à la fin du mois de septembre.

 

Au Brésil, les exportations de ces derniers mois se sont faites à des rythmes légèrement inférieurs à ceux de l’année dernière. Le Fob brésilien moyen a également perdu 8 $/t en une semaine dans le sillage des cours américains (545 $/t). Le renchérissement du dollar est également responsable de la baisse des prix exprimés en dollar.

 

Baisse du tourteau de soja américain dans le sillage de la fève, stabilité à Montoir

Le prix du tourteau de soja à Chicago évolue dans le sillage de la fève en perdant 7,5 $/t en une semaine (388 $/t). À Montoir, il reste stable à 410 €/t. Le tourteau Fob argentin perd quant à lui environ 4 $/t, à 396 $/t. Les opérateurs argentins confirment et intègrent des contraintes liées aux niveaux d’eau du Paraná sur le début de la nouvelle campagne au moins, si ce n’est plus.

 

En Inde, après les annonces de la semaine dernière sur l’autorisation d’importation de tourteau OGM pour pallier la pénurie locale, les acteurs du marché sont toujours dans l’attente de précisions sur le cadre légal pour mettre en place leurs opérations commerciales et logistiques.

 

Le tournesol suit le colza et les huiles

En France, le prix du tournesol est resté stable pour la qualité standard et remonte de 15 €/t pour le tournesol oléique. La prime oléique s’élève maintenant à 25 €/t, alors que les deux qualités étaient à parité l’année dernière à la même époque. Le prix Fob moyen mer Noire gagne, quant à lui, 5 $/t sur une semaine à 552 $/t, dans le sillage de l’huile.

 

La récolte des tournesols commence à peine dans la zone de la mer Noire dans les parcelles les plus précoces. En Ukraine, en plus de la surface record estimée, le rendement pourrait nettement s’améliorer sur une année. La récolte est ainsi prévue à un plus haut niveau historique de 16,3 Mt. Ce chiffre dispose encore d’un potentiel de hausse si les conditions climatiques favorables observées actuellement se maintiennent jusqu’aux moissons. En Russie, la production est également attendue en nette progression (à un second record historique) grâce à une surface et des rendements prévus en forte augmentation.

 

Par ailleurs, le ministère russe de l’Agriculture a fixé le droit d’exportation de l’huile de tournesol à 169,9 $/t à partir du 1er septembre (calculé sur la base d’un prix indicatif de 1 242,8 $/t). En effet, à partir du 1er septembre 2021 et jusqu’au 31 août 2022, un nouveau mécanisme de calcul du droit d’exportation de l’huile de tournesol entrera en vigueur en Russie. Ainsi, une taxe flottante de 70 % calculée sur la base d’un prix indicatif sera appliquée sur les exportations et mise à jour tous les mois. Les prix intérieurs devraient s’ajuster à la baisse sous la pression de ce droit d’exportation.

 

À suivre : retours qualitatifs des récoltes de blé en Europe de l’Ouest, climat en mer Noire et en Europe (tournesol, colza), et en Amérique du Nord (maïs, canola, soja), demande des pays émergents en huiles, prix du pétrole et parité euro-dollar.