La semaine qui se termine est venue confirmer trois grandes tendances : la dégradation de la qualité du blé dans l’UE (Union européenne), l’impact négatif du climat estival sur la production attendue de maïs dans l’UE et enfin, l’attitude de l’Égypte qui se borne à refuser les chargements ne respectant pas un taux zéro pour l’ergot.

 

En ce qui concerne la qualité, la poursuite des mesures effectuées dans le cadre de l’enquête de FranceAgriMer et Arvalis confirme la part extrêmement faible de la récolte française dont le poids spécifique (PS) est supérieur ou égal à 76 kg/hl (24 %). À l’autre extrémité du spectre qualitatif, on trouve les blés dont le PS est inférieur à 72 kg/hl (40 %).

 

Les organismes stockeurs s’évertuent actuellement, par un lourd travail de nettoyage et de calibrage, à sauver quelques quantités pour les rehausser au niveau de 74 kg/hl afin de répondre à la demande meunière. Quoi qu’il en soit, le pays devra réduire ses ventes vers l’extérieur, aussi bien vers les autres états membres de l’UE que vers les pays tiers.

 

Du côté des pays tiers justement, l’Égypte fait de nouveau parler d’elle. Après les annonces de la semaine dernière, un bateau de blé roumain prêt à partir pour l’Égypte annule son départ, les vendeurs ne voulant pas prendre le risque d’un refus à l’arrivée. Et une autre société de négoce vient d’annoncer qu’elle cherchait un nouveau débouché pour son chargement de blé russe arrivé le 22 juillet en Égypte mais non déchargé.

La Russie exporte en Algérie

Nous parlions du nouveau revirement de l’Égypte comme d’une douche froide la semaine dernière. L’effet est encore plus marqué cette semaine, la Russie prenant peur pour un débouché qui devait normalement représenter 20 % de ses exportations. Cet élément a fortement pesé sur les prix mondiaux à la fin de la semaine, sur les prix de la zone de la mer Noire essentiellement. En revanche, il est intéressant de noter que la Russie a déjà chargé 12 000 tonnes de blé vers l’Algérie alors que ce dernier pays n’importe quasi pas de blé russe d’habitude.

 

La forte dégradation qualitative des blés français explique l’intérêt que pourrait porter l’Algérie aux blés russes cette année mais il reste encore jusqu’à maintenant beaucoup d’incertitudes sur le fait de savoir si l’Algérie est prête à importer des quantités massives de blé russe (son office étatique d’achat, l’OAIC, restant d’habitude très prudent face aux blés russes à cause de craintes liées à la présence de punaises).

 

Beaucoup de pays importateurs cherchent actuellement des alternatives car les dernières semaines viennent aussi de confirmer la forte dégradation qualitative des blés baltes. En Lituanie, la part des blés fourragers sera de 50 % alors qu’elle se situait à 20 % seulement en 2015. L’ensemble de ces facteurs a de nouveau comprimé les prix fourragers et les prix meuniers sur le marché mondial et dans l’UE. Sur Euronext, l’échéance de décembre a perdu presque 4 €/t par rapport à la semaine dernière (à 158,25 €/t au milieu de l’après-midi de ce vendredi). À Rouen, le blé meunier abandonne 5 €/t à 154 €/t et le blé fourrager perd 3 €/t à 145 €/t.

Un marché du maïs très contrasté

Du côté du maïs, une situation très contrastée : le marché mondial voit ses prix chuter nettement au départ de l’Ukraine, de l’Amérique du Sud et même des États-Unis (USA). En revanche, les valeurs françaises augmentent légèrement à 155 €/t à La Pallice (+2 €/t) et 160,50 €/t en position Fob à Bordeaux (+1,50 €/t).

 

L’arrivée de la seconde récolte au Brésil (récolte d’hiver) et le début des opérations de récolte aux USA pèsent sur les valeurs mondiales d’autant plus que de très bons rendements se profilent aux USA. À l’inverse, la situation de l’UE devient de plus en plus critique : les conditions estivales ont dégradé les potentiels de rendement si bien que la récolte UE ne dépassera pas de beaucoup celle de l’an dernier et que la récolte française s’annonce même inférieure désormais. Cela a donc soutenu le prix du maïs dans l’UE même si les perspectives d’importation empêcheront une forte tension.

 

En orge, les valeurs fourragères s’affaissent de nouveau sous la pression de la mer Noire (très compétitive) à 128,50 €/t à Rouen (–1,75 €/t) mais les valeurs brassicoles restent stables ou grimpent (à 177 €/t Fob Creil pour la brasserie d’hiver et 194 €/t pour la brasserie de printemps), soutenues par les mauvaises performances qualitatives de plusieurs pays, du Danemark notamment où la part des orges aptes à la brasserie vient d’être revue en baisse.

 

La demande d’oléagineux soutient les cours

Les prix du soja ont légèrement remonté cette semaine. À Chicago (marché à terme), ils regagnent ainsi 12 $/t sur le rapproché, soutenus par une forte demande à l’exportation. Une délégation chinoise a récemment signé pour 4 millions de tonnes (Mt) d’achats de soja US, et les ventes continuent d’être fortes vers de nombreuses destinations. Par ailleurs, les prix de l’huile de palme sont toujours soutenus, car les stocks en Malaisie sont attendus en baisse, et le prix du pétrole repart à la hausse.

 

Les gains sont toutefois limités par des conditions de culture qui restent très favorables aux États-Unis, et par les perspectives de hausse de la prochaine récolte de soja au Brésil.

 

Dans le sillage du soja, les prix du colza remontent légèrement. Au Canada, l’office statistique a publié ses estimations de stocks de colza (canola) à la fin de juillet 2016, à environ 2 Mt. Cela implique une récolte en 2015 à 18,4 Mt (contre 17,2 Mt avant), ce qui renforce donc le potentiel d’exportation du Canada pour la campagne qui commence. Les opérations de récolte du canola sont pour l’instant retardées par les pluies, il faudra suivre de près l’avancée des moissons et d’éventuelles pertes (les plants sont habituellement coupés et séchés au champ avant d’être rentrés). La récolte devrait néanmoins être record : nous la prévoyons autour de 18,7 Mt.

 

De très nombreux chargements arrivent dans les ports de l’Atlantique, notamment en France (avec 21 000 tonnes arrivées du Canada en juillet, et des bateaux de la Bulgarie et de l’Ukraine en août), mais surtout en Belgique et aux Pays-Bas (colzas roumains surtout). Cela modère la hausse des prix : le rendu Rouen gagne près de 6 €/t et le Fob Moselle 5 €/t, tandis qu’Euronext remonte de 3,50 €/t sur le rapproché.

 

Le prix du tournesol à Saint-Nazaire est en légère hausse, à 360 $/t, soutenu par la remontée du prix des huiles.

Hausse du tourteau de soja aux USA, baisse dans l’UE

Les cours du tourteau de soja gagnent 13 $/t à Chicago (à 358 $/t), soutenus à la hausse par les prix des graines de soja et par ceux du maïs. Au contraire, les prix à Montoir reculent de 5 $/t cette semaine, pénalisés notamment par la hausse de l’euro face au dollar.

 

Le pois fourrager départ Marne reste coté (en nominal) à 215 €/t.

 

À suivre : attitude de l’Égypte sur la question du taux d’ergot, les origines choisies par l’Algérie, la récolte australienne à venir, la taille des récoltes de maïs et de soja aux États-Unis, le rapport USDA lundi prochain très attendu sur ce dernier point.

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