L’histoire
Agricultrice dans le Var, Irène avait fait l’acquisition d’un beau terrain à vocation agricole, ombragé, situé au cœur du massif de l’Esterel, avec vue sur mer. Elle l’avait aménagé en aire de camping-caravaning. Après des travaux de nivellement, le terrain a été divisé en trois parcelles équipées en réseau électrique. Pour préserver la sécurité des campeurs, Irène avait édifié sur chacune une clôture d’une hauteur de 2 mètres. Mais, à l’occasion d’un contrôle administratif, le maire avait pris un arrêté mettant l’agricultrice en demeure de procéder à l’enlèvement des clôtures, implantées sans autorisation. N’ayant pas obtempéré, un procès-verbal avait été dressé et transmis au parquet.
Le contentieux
Irène avait alors été poursuivie devant le tribunal correctionnel pour infraction aux dispositions du plan local d’urbanisme (PLU), et pour édification irrégulière de clôture. Le parquet avait fondé les poursuites pénales sur l’article R. 421-12 du code de l’urbanisme, qui soumet à déclaration préalable l’édification d’une clôture située dans un secteur délimité par le PLU, ou dans une commune où le conseil municipal a décidé d’imposer une telle déclaration. Or, en l’espèce, le terrain d’Irène était situé dans une zone inondable, où les travaux de clôture étaient soumis à déclaration préalable d’après le PLU en place.
L’agricultrice était décidée à ne pas se laisser faire. Pour se défendre, elle avait invoqué l’article 647 du code civil sur la liberté de tout propriétaire de clore son bien. Aussi, même si le droit de se clore n’est pas d’ordre public, il ne peut lui être porté atteinte par une réglementation illégale. Or, les dispositions du PLU de la commune, soumettant à déclaration préalable l’implantation de clôtures sur les terrains situés dans la zone concernée, ne procédaient-elles pas d’un excès de pouvoir de la part de la mairie ? N’étaient-elles pas de nature à entacher d’illégalité les poursuites à l’encontre d’Irène ?
« Le maire avait pris un arrêté mettant l’agricultrice en demeure de procéder à l’enlèvement des clôtures, implantées sans autorisation. »
Les juges correctionnels avaient écarté l’argument et condamné l’agricultrice. En l’état des dispositions de l’article R. 421-12 du code de l’urbanisme et du PLU, l’édification d’une clôture, même d’une hauteur inférieure à 2 mètres, devait être précédée d’une déclaration de travaux. Irène, qui ne pouvait ignorer la situation de son terrain, avait enfreint ces dispositions en l’implantant sans faire de déclaration préalable. Son pourvoi a été rejeté par la chambre criminelle de la Cour de cassation, qui s’est retranchée derrière l’article 544 du code civil : « Le droit de propriété, comme celui de se clore, ne s’exerce que si l’on n’en fait pas un usage prohibé par les lois et règlements. »
L’épilogue
L’agricultrice a été condamnée à une amende et à la remise en état des lieux dans un délai de six mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard. Il est certain qu’elle a été imprudente, car nul n’est censé ignorer la loi.
Pour continuer à exploiter son terrain de camping, Irène devra engager une démarche auprès de la mairie pour déclarer les travaux de clôture nécessaires à l’aménagement de ses aires de stationnement de caravanes.
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