La vente de matériel entre agriculteurs est une transaction réalisée entre professionnels. Elle ne permet pas d’avoir toutes les garanties du droit de la consommation. Cette vente, dite « dérogatoire », ne donne pas à l’acheteur la possibilité de bénéficier de la protection contre les clauses abusives ou du délai de rétractation comme pour les particuliers. Pour la sécuriser, il est conseillé au vendeur de mentionner avec précision le matériel, avec un descriptif détaillé et en n’oubliant pas d’indiquer le relevé d’heures au compteur. De l’autre côté, si l’acheteur constate des dysfonctionnements, il ne doit pas hésiter à en faire part au cédant, idéalement par lettre recommandée.
Même si la vente est dérogatoire, le vendeur est tenu de la garantie des vices cachés pour une période de deux ans. Un vice caché est un défaut qui existait au moment de la cession mais qui n’est pas apparent. L’acheteur professionnel est présumé connaître les défauts et c’est à lui de rapporter la preuve que ces derniers n’étaient pas décelables. En pratique, il peut être aussi mentionné expressément dans le contrat de vente entre professionnels que le vendeur ne garantit pas les vices cachés.
Figer la situation
« Le principal contentieux que l’on rencontre du côté du vendeur concerne le paiement du prix », rapporte maître Dausse. En cas de retard de règlement, le premier réflexe du vendeur est d’envoyer une mise en demeure à l’acheteur pour commencer à faire courir les intérêts de retard. Si le problème persiste, la suite de la procédure devra se dérouler devant le tribunal judiciaire.
« Du côté de l’acheteur, si celui-ci constate une anomalie, il ne doit plus utiliser le matériel afin de figer la situation. Il peut ensuite faire dresser un constat d’huissier pour se ménager la preuve », ajoute l’avocat. Avec ou sans ce document, l’acheteur adressera une mise en demeure au vendeur afin de tenter de régler le litige à l’amiable. En cas d’impasse, l’acquéreur pourra assigner le cédant devant le tribunal judiciaire. Il pourra demander la désignation d’un expert judiciaire qui sera responsable de vérifier l’existence d’un vice caché, de chiffrer le préjudice éventuellement subi (perte d’exploitation, location d’un matériel de remplacement...) et de déterminer si cela est réparable. Après l’expertise, l’acheteur sera en droit de demander au tribunal l’annulation de la vente ou la réduction du prix d’achat.
L’expert
« Insérez une clause de réserve de propriété »
Maître Xavier Dausse, avocat au barreau de Paris
« Pour se ménager des impayés, le vendeur a la possibilité d’insérer une clause de réserve de propriété. Elle permet de retarder le transfert de propriété jusqu’au moment du paiement intégral du prix par l’acheteur, même si le bien lui a déjà été livré. Pour qu’elle soit valable, la clause doit être mentionnée de manière apparente dans le contrat de vente, la facture, le devis ou le bon de commande par exemple. Les biens concernés doivent être explicitement indiqués. Pour la faire appliquer, il faut se tourner vers un huissier. »