Sont-elles à l’origine des conflits ou révélatrices des tensions existantes ? Les commentaires sur la place des femmes dans les échanges familiaux évoluent.
Longtemps accusées d’être à l’origine des tensions, les femmes seraient révélatrices des dysfonctionnements présents dans les collectifs agricoles. Virginie Rousselin, conseillère en relations humaines au sein de l’Atag (1) du Tarn, observe : « Nos interventions s’adressent aux hommes comme aux femmes. Mais souvent, celles-ci, prises en sandwich dans les disputes, prennent l’initiative de nous contacter. Elles se préoccupent aussi davantage de dégager du temps pour la vie privée, une clef de la durabilité en famille. »
Éviter les non-dits
Même constat pour Céline Marec, chargée de mission « Relations humaines » à Trame (2). Là également, les formations ne sont pas « genrées ». Mais les femmes sont plus présentes quand il s’agit de relations humaines. Les sujets que demandent à travailler les groupes féminins adhérents à Trame traduisent cette attente : « Équilibrer ses temps de vie », « Se déconnecter de son travail »…
S’il y a une spécificité de la place des femmes dans les relations familiales, elle tiendrait dans la volonté plus forte d’éviter les non-dits, tout en disant les choses avec tact.
À l’image de Marie-Christine Le Crubière, dans les Côtes-d’Armor. Longtemps conjointe collaboratrice, elle fait partie du Gaec familial créé en 2017 avec son mari (aujourd’hui en retraite) et son fils. Ils emploient un second fils comme salarié. Membre de l’association bretonne « L’agriculture au féminin », elle a participé à la journée « Trouver l’accord parfait entre générations ». « Les relations humaines, cela s’apprend : savoir dire les choses et les dire. L’arrivée de mon fils salarié nous a obligés à être rigoureux, à décortiquer nos horaires. Je mène la réunion du lundi et je ne veux pas réentendre après coup ce qui n’a pas été dit. »
Suivre des formations
Autre regard chez Mareva Hervouët et son conjoint, installés sur une exploitation en Loire-Atlantique depuis deux ans après une autre vie professionnelle : assistance vétérinaire pour Mareva et agriculteur pour Mathieu. Éleveurs laitiers, ils ont conçu leur système pour mener à bien leur vie parentale : un système tout herbe, avec cinq mois de monotraite et trois mois de tarissement, un emploi du temps alterné pour s’occuper à part égale de leurs trois enfants, une journée de travail qui s’achève vers 17 h 30. « Un an avant mon installation, j’ai intégré le groupe “femmes” du Civam de Loire-Atlantique. Un véritable atout. Ma première formation était consacrée à la communication entre associés. »
Les Civam (3) mènent une réflexion approfondie sur le genre. Une piste prometteuse pour améliorer la vivabilité des collectifs agricoles.
Marie-Gabrielle Miossec
(1) Association tarnaise pour l’agriculture de groupe.
(2) Association nationale de développement agricole et rural.
(3) Centres d’initiatives pour valoriser l’agriculture et le milieu rural.
Martine Cordel, installée en 1992 après dix ans de travail extérieur, a longtemps mené le Gaec Alliance, à Kirschnaumen (Moselle), qui compte six associés, son mari, son fils et trois autres agriculteurs : « Quand les associés extérieurs sont arrivés, nous avons rebattu les cartes selon les attentes de chacun. Nous sollicitions un appui extérieur dans les moments clés. Le lundi, nous prenons le petit déjeuner avec nos salariés. Nous parlons du planning. Jusqu’ici, j’assurais le leadership organisationnel, basé sur le respect de l’autre. Mon fils, que cette approche a séduit, a pris le relais, validé par les autres associés. »