1. « LE MAÏS EST LE SYMBOLE DE LA SCIENCE »

Le maïs est l’espèce pour laquelle les premiers hybrides végétaux ont été créés, en croisant deux lignées homogènes. La culture est ainsi souvent identifiée à la « science », portée par les biotechnologies et les firmes semencières privées. C’est aussi la plante emblématique de la civilisation américaine.

Son renouveau en France intervient après la Seconde Guerre mondiale avec l’arrivée des hybrides américains que les responsables agricoles du Sud-Ouest ont encouragés. Jean-Paul Renoux, ancien responsable de la filière maïs chez Arvalis et conseiller technique de l’AGPM (association générale des producteurs de maïs), écrit dans un ouvrage publié en 2014 (1) : « Le maïs est devenu alors l’un des symboles de la renaissance de l’agriculture française, avec la croissance phénoménale des surfaces et des rendements à partir des années 1960. L’interrogation actuelle sur le modèle productiviste de l’agriculture, son identification à la science, voire son artificialisation, déplace souvent le débat vers l’irrationnel et va culminer avec les OGM. » (Lire l’encadré). Mais si l’image du maïs est la science, c’est aujourd’hui encore la culture des petites et moyennes exploitations du sud et de l’est de la France, des bocages de l’ouest et des régions de polyculture élevage.

2. « Il est mal adapté au changement climatique »

« Il y a actuellement beaucoup d’“écoanxiété” par rapport au changement climatique, ce qui a une traduction directe sur la filière maïs qui n’a jamais eu autant d’ennemis coalisés contre elle, soulignait en septembre dernier Bertrand Valiorgue, professeur de stratégie et gouvernance des entreprises à l’université Clermont Auvergne, lors de la présentation des résultats du projet de recherche Amaizing. Certains pensent en effet qu’il faut supprimer le maillon élevage et donc la culture du maïs avec d’autres sources de protéines végétales en substitution. » Si cette plante n’est pas la meilleure pour tirer parti de cette évolution comparée à d’autres, elle reste néanmoins une culture très efficace. D’origine tropicale, elle possède une photosynthèse de type C4 (comme le sorgho par exemple) captant beaucoup de CO2 (lire p. 53). La plante se caractérise ainsi par un meilleur rendement photosynthétique et une meilleure utilisation de l’eau que les plantes en C3 (la plupart des autres plantes cultivées). « Ce qui la rend adaptée aux évolutions à venir », insiste l’AGPM. Le maïs devrait donc toujours avoir sa place dans ce contexte de changement climatique, avec un déroulement des stades végétatifs plus rapide. L’offre variétale devra s’étoffer, avec des précocités adaptées et davantage de résilience au stress thermique et hydrique, tout en maintenant le niveau de performances.

3. « Son rendement stagne »

Certains constatent une stagnation générale des rendements qui serait le signe d’un épuisement du modèle agricole actuel. Mais le maïs échappe en partie à ce jugement puisque la progression des rendements se maintient en France. Avec cette année, un record à 110 q/ha, selon les derniers chiffres d’Arvalis. « Les générations de variétés de maïs qui se sont succédées mais aussi le progrès des systèmes de culture ont augmenté les rendements en grains d’environ 1,45 q/ha par an (moyenne nationale de 1951 jusqu’au début des années 2000) », écrivent les chercheurs du projet Amaizing, qui vient de se terminer après dix ans de travaux. Si ce gain a ralenti ces dernières années pour atteindre 0,35 q/ha par an, il reste si­gnificatif­, contrairement à celui d’au­tres céréales.

Chaque année en France, 50 à 70 nouvelles variétés de maïs sont inscrites au catalogue grâce à une amélioration continue sur ce critère. La sélection variétale contribue en grande partie à cette hausse des rendements : le progrès génétique a ainsi fait un bond de 1 q/ha/an (entre 1950 et 2016), soit 1 à 2 % par an. « Contrairement à une idée reçue, les rendements ont progressé à la même vitesse en conditions optimales qu’en conditions de sécheresse ou en années chaudes, révèle François Tardieu, de l’Inrae à Montpellier. C’est une bonne chose, mais cela veut aussi dire que si on veut stabiliser le rendement d’une année sur l’autre, il faudrait que le progrès génétique soit plus fort en conditions limitées. » Car si la sélection compense souvent la dégradation des conditions environnementales (températures élevées, sécheresse, limitation des apports d’azote), il arrive que ça ne soit pas le cas en années extrêmes (2003) ou si les phénomènes défavorables s’accumulent (2016).

Mais des marges de progrès existent. Il y a un important réservoir de diversité génétique à exploiter pour adapter le maïs aux stress climatiques par exemple. « Il va cependant falloir aller chercher, en plus du rendement (phénologie, développement reproducteur, architecture…), des caractères plus physiologiques comme le contrôle de la croissance foliaire ou celui de la transpiration, développe François Tardieu. Toutefois, ces caractères vont avoir des effets positifs dans certains types d’environnement et négatifs dans d’autres. Ce qui oblige à créer des génotypes pour des milieux particuliers, grâce à la sélection génomique, la phénomique et la modélisation. » Avec pour objectif final : avoir des variétés acceptables par la société.

(1) « Le Maïs, une plante pour l’intensification écologique », Editions France Agricole.

 

 

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