Essayer de s’adapter en recherchant les produits phyto qui contiennent les ZNT les plus faibles s’avère compliqué, selon les types d’exploitations et leurs filières respectives. Même pour des gammes bien pourvues, il est difficile d’imaginer l’utilisation de produits différents sur une même parcelle. « Quant aux produits de biocontrôle, ils sont exemptés de ZNT riverains, précise Benjamin Perriot, d’Arvalis. Mais pour les usages herbicides par exemple, nous sommes toujours sans solution », ajoute-t-il.
Bien qu’à ce jour, les ZNT riverains soient majoritairement non valorisées, des réflexions sont en cours selon les territoires. « Dans l’attente des dernières précisions concernant les distances (3 m ? 5 m ? 10 m ?) et la classification de certaines matières actives (CMR2 ?), il y aura quand même, au bout du compte, des bandes non traitées à respecter aux abords des riverains et donc un impact pour les agriculteurs », indique Aurélien Dubos, référent technique à la chambre d’agriculture de Normandie. Il s’agit « d’essayer, non pas de gagner de l’argent, mais d’en perdre le moins possible », ajoute-t-il.
Des points pour la Pac ?
Continuer de semer sa culture jusqu’en limite de propriété présente l’avantage de ne pas modifier son assolement, mais avec la contrepartie d’un risque accru de salissement, de développement de maladies ou d’attaques de ravageurs. « Outre le manque à gagner que cela peut occasionner, ces situations génèrent parfois du conflit avec les riverains là où il n’y avait pas lieu d’être », avertit le conseiller. Ainsi, les prairies, les jachères et les cultures à bas niveau d’intrants constituent des solutions de remplacement possibles, sans être exhaustives. Dans tous les cas, elles seront à adapter à chaque situation, selon le type d’exploitation et les surfaces concernées par des ZNT. La mise en place de ces nouvelles cultures ou couverts peut également exiger un jonglage avec d’autres enjeux, tels que les règles d’entretien sur les jachères. À l’inverse, ces changements d’assolement peuvent faciliter l’accès au paiement vert, avec notamment les surfaces d’intérêt écologique. « Ils pourraient aussi aider les agriculteurs à obtenir les points nécessaires à la diversité des cultures pour la future Pac de 2023 », précise Aurélien Dubos.
Concernant plus particulièrement les cultures à bas niveau d’intrants, il sera indispensable de se questionner en amont sur le débouché et la capacité à faire sans produit phytosanitaire.
Rentabilité possible
Sans être la solution miracle, le miscanthus et les taillis à très courte rotation de saules peuvent être intéressants pour les ZNT, puisqu’ils nécessitent peu d’entretien en dehors des récoltes. « Les premières années peuvent être délicates en termes de désherbage, mais l’intervention reste réalisable mécaniquement, avec du matériel plus ou moins spécifique selon la culture », indique Bastien Langlois, conseiller biomasse à la chambre d’agriculture de Normandie. L’autre avantage réside dans leur rentabilité possible : « En Seine-Maritime, nous sommes sur des filières locales pour le miscanthus (paillage horticole, litière animale…), tandis que le saule est sous contrat avec un intermédiaire pour la vente en chaufferies », précise-t-il.
L’année dernière, entre 20 et 30 % des plantations en bandes du département ont été faites spécifiquement sur des ZNT riverains. Si une dynamique semble être enclenchée, ce n’est pas pour les ZNT qu’elle trouve son origine. « Nous avons lancé le projet en 2010 pour lutter contre l’érosion et le ruissellement. Les agriculteurs ont ensuite commencé à planter pour le petit gibier et favoriser la biodiversité. Puis par la force des choses, c’est arrivé sur les ZNT », précise le conseiller.
Acceptabilité sociale
Ces plantations ne sont pas pour autant exemptées de risques de conflit avec les riverains, en raison de leur gêne visuelle et, pour le miscanthus, des feuilles qui peuvent se retrouver dans les propriétés en hiver. L’acceptabilité sociale de ces cultures en bandes fait partie des axes de travail d’un GIEE, dont la chambre d’agriculture de Normandie porte l’animation (lire le témoignage ci-dessous). D’une manière générale, l’enjeu de la communication sera de taille. Car outre la complexité de la réglementation, les possibilités d’adaptation sont multiples, sans que cela soit forcément identifiable visuellement par les riverains. Pour l’Office français de la biodiversité, dans un contexte de tensions sur la question des phytos, ces ZNT peuvent aussi être vues comme un moyen de montrer les efforts réalisés.
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