Siv-Chheng Tiv a peur de la fermeture de l’entreprise qu’elle dirige, la fonderie Obertino Morteau du Doubs. Spécialisée dans la confection ancestrale de cloches en bronze, son usine est affectée par les conséquences de la crise du Covid-19. Depuis le Salon de l’agriculture en mars dernier, tous les événements agricoles, comices compris, ont été annulés cette année 2020. La clé sous la porte, c’est l’issue qu’imagine Siv-Chheng Tiv. Mais c’est sans compter sur le soutien étroit des éleveurs de la région.
L’appel au secours d’une fonderie au savoir-faire ancestral
« Je ne pensais jamais être touchée par ce virus avec une telle renommée, mais on n’arrive même pas à sauver notre peau », déplore Siv-Chheng Tiv à La France Agricole. À la tête d’Obertino Morteau depuis deux ans, cette directrice au parcours atypique, comme elle le définit, espère de tout cœur maintenir sa fonderie à flot. « Le cœur de l’activité est le savoir-faire d’excellence qui date de plus de trois siècles, précise-t-elle avec fierté. Il fait partie du patrimoine culturel national et notre fonderie est labellisée patrimoine vivant. »
Au vu de la situation économique actuelle, cette femme d’origine cambodgienne qui a grandi en France et a voyagé à travers le monde, a dû lancer un « appel au peuple » pour éviter à son entreprise ancestrale de sombrer. Car l’annulation des événements agricoles pèse lourdement. À l’heure actuelle, « c’est 50 à 60 % de chiffre d’affaires en moins », détaille-t-elle. C’est également un millier de cloches fondues en moins : « Au lieu de quatre coulées de 45 kg de cloches par jour, nous sommes à une seule par semaine », s’inquiète-t-elle.
« On m’a investie d’une mission, celle de transmettre ce savoir-faire plus loin, mais je ne pensais pas en arriver là un jour, si je licencie, le savoir-faire s’arrête. » Sur une douzaine d’employés qui mettent environ une année entière à apprendre les fondements du métier et des années encore pour se perfectionner, deux ont dû être licenciés au cours des derniers mois. Un bilan catastrophique qui a nécessité « un appel au secours » auprès des éleveurs locaux.
Les cloches de la solidarité
« On travaille à 50 % avec les agriculteurs. » C’est donc tout naturellement que Siv-Chheng Tiv a lancé un appel auprès d’eux : « Un éleveur m’a contactée pour me dire : “Pourquoi ne faites-vous pas une cloche de la solidarité pour qu’on vous aide ?” » Résultat, depuis le vendredi 20 novembre 2020 dernier, la fonderie Obertino Morteau réalise une édition spéciale de cloches en bronze.
À destination des éleveurs pour leurs bovins ou des particuliers à l’approche des fêtes de Noël, ces cloches de taille différente ont gravé sur leur flanc « Solidarité 2020 ». « Ceux qui l’achètent prouvent qu’ils sont solidaires vis-à-vis de nous », explique la directrice de la fonderie.
L’idée est venue tout droit des éleveurs. C’est ensemble, réunis en visioconférence, que Philippe Monnet, président de la FDSEA locale, Julien Jouille, président du Syndicat des éleveurs de montbéliardes du Doubs, et Philippe Schaller, président de la Fédération des comices du département, ont initié un bel élan de solidarité. « On sentait bien que l’absence de comices et des concours agricoles sur l’année allait peser sur la fonderie Obertino Morteau », témoigne à La France Agricole Philippe Schaller.
« Cet élan de solidarité m’a beaucoup touchée »
« À la Fédération, on a un réseau de 21 comices. Donc, on a proposé un bon d’achat de 50 euros financé par les comices à leurs éleveurs pour les inciter à acheter ces cloches. Au total, l’achat d’une cloche est financé à 50 % avec les autres aides, notamment celle du syndicat des éleveurs », détaille-t-il encore.
« Au sein du syndicat des éleveurs de montbéliardes du Doubs, il a été décidé que si un cotisant s’engageait à acheter une cloche de la solidarité, le syndicat lui offrait sa cotisation annuelle de 50 euros », confirme le producteur de lait AOP Julien Jouille.
Et les premières réponses ne se sont pas fait attendre. « Les gens ont pris conscience de la situation, même les particuliers ont tendant à acheter des coches pour les fêtes de Noël », se réjouit le président des comices du Doubs. « Nous, on est 300 adhérents dans le syndicat des éleveurs et on les sent mobilisés ! », renchérit Julien Jouille. Et d’ajouter, « on se rend compte qu’il ne faut pas les laisser tomber ».
À l’approche des fêtes de fin d’année, cet élan de solidarité permet à la fonderie Obertino Morteau de garder espoir : « Ça m’a beaucoup touchée ; ça va nous aider à traverser cette épreuve », espère Siv-Chheng Tiv.
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La fonderie artisanale Obertino Morteau, labellisée Entreprise du patrimoine vivant, est spécialisée dans la fabrication ancestrale de cloches en bronze. De taille et de forme différentes, ces cloches résultent d’un savoir-faire vieux de trois siècles. Sur cette photo : une coulée de bronze à 1 200°C . © Siv-Chheng Tiv
Sur cette photo : le tournage d’une cloche. © Siv-Chheng Tiv
Sur cette photo : l’inscription d’une cloche au moment de son moulage. © Siv-Chheng Tiv
La fonderie artisanale Obertino Morteau est également spécialisée dans le cuir. Sur cette photo : la décoration d’une courroie en cuir qui viendra agrémenter une cloche. © Siv-Chheng Tiv
À l’initiative notamment du Syndicat des éleveurs de montbéliardes du Doubs et de la Fédération des comices du Doubs, la fonderie Obertino Morteau crée une édition spéciale de cloches sur lesquelles est gravée l’inscription « Solidarité 2020 ». Sur cette photo : des cloches de la solidarité, certaines étant personnalisées. © Siv-Chheng Tiv
La directrice de la fonderie Obertino Morteau, qui a repris l’entreprise il y a deux ans, a lancé un appel au secours auprès des éleveurs du Doubs. Face à la crise économique du Covid-19, le savoir-faire ancestral des producteurs de cloches en bronze est menacé. De ce constat est née l’idée de confectionner et de vendre des cloches de la solidarité. Sur cette photo : Siv-Chheng Tiv, la directrice de la fonderie et de l’atelier de cuir Obertino Morteau. © Fonderie
L’annulation des comices, au cours desquels vaches et cloches sont présentées en apparat, laisse derrière elle des éleveurs en manque de lien social et des fonderies au bord de la faillite. Sur cette photo : un comice agricole dans le Doubs avec une présentation de cloches. © François Vuillemin
La fonderie artisanale Obertino Morteau, labellisée Entreprise du patrimoine vivant, est spécialisée dans la fabrication ancestrale de cloches en bronze. De taille et de forme différentes, ces cloches résultent d’un savoir-faire vieux de trois siècles. Sur cette photo : une coulée de bronze à 1 200°C . © Siv-Chheng Tiv
Sur cette photo : le tournage d’une cloche. © Siv-Chheng Tiv
Sur cette photo : l’inscription d’une cloche au moment de son moulage. © Siv-Chheng Tiv
La fonderie artisanale Obertino Morteau est également spécialisée dans le cuir. Sur cette photo : la décoration d’une courroie en cuir qui viendra agrémenter une cloche. © Siv-Chheng Tiv
À l’initiative notamment du Syndicat des éleveurs de montbéliardes du Doubs et de la Fédération des comices du Doubs, la fonderie Obertino Morteau crée une édition spéciale de cloches sur lesquelles est gravée l’inscription « Solidarité 2020 ». Sur cette photo : des cloches de la solidarité, certaines étant personnalisées. © Siv-Chheng Tiv
La directrice de la fonderie Obertino Morteau, qui a repris l’entreprise il y a deux ans, a lancé un appel au secours auprès des éleveurs du Doubs. Face à la crise économique du Covid-19, le savoir-faire ancestral des producteurs de cloches en bronze est menacé. De ce constat est née l’idée de confectionner et de vendre des cloches de la solidarité. Sur cette photo : Siv-Chheng Tiv, la directrice de la fonderie et de l’atelier de cuir Obertino Morteau. © Fonderie
L’annulation des comices, au cours desquels vaches et cloches sont présentées en apparat, laisse derrière elle des éleveurs en manque de lien social et des fonderies au bord de la faillite. Sur cette photo : un comice agricole dans le Doubs avec une présentation de cloches. © François Vuillemin