« L’agriculture de conservation ne se résume pas au semis direct. Ce n’est pas parce qu’on produit des pommes de terre que l’on ne peut pas la pratiquer », explique Xavier Piot, installé avec sa femme à Attichy, dans l’Oise. En 2015, il fonde Sol Avenir 60, un groupe affecté à l’agriculteur de conservation.
Ce système de production repose pour lui sur trois piliers : la réduction du travail du sol, la couverture permanente et la baisse draconienne de l’usage de la chimie. Avec son voisin Bruno Delacour, producteur de pommes de terre sur le plateau du Soissonnais, et une quinzaine d’autres agriculteurs, ils cherchent à remettre le sol au cœur de leur système de production.
La réduction du travail du sol
Xavier et Bruno ont depuis ont arrêté le labour et travaillent leur sol au minimum, seulement lorsque c’est nécessaire et le plus tard possible. Ce n’est pas seulement le travail du sol qui est néfaste, mais aussi l’état de vulnérabilité dans lequel il laisse la terre. Ils maintiennent donc les résidus de culture et le couvert sur le sol pour nourrir les micro-organismes et les vers de terre pendant tout l’hiver afin que la vie du sol reprenne au plus vite ses droits après le bouleversement de la plantation.
Les couverts
Les couverts sont au cœur du système de production. « Un couvert, c’est un moyen de capter le carbone de l’air et de le transformer en sucre grâce à l’énergie du soleil pour nourrir les micro-organismes du sol », explique Bruno Delacour. Les agriculteurs diversifient au maximum leurs cultures intermédiaires (féverole, vesce, trèfle, pois, radis chinois, radis fourrager, moutarde d’Abyssinie, lin, sarrasin, tournesol) car chaque espèce produit un exsudat racinaire spécifique qui va développer un panel de micro-organismes particulier. L’objectif est d’avoir un sol le plus vivant et le plus équilibré possible.
La réduction draconienne de l’usage de la chimie
Au sein du groupe Sol avenir, 60, Bruno s’est particulièrement penché sur la santé des végétaux. Pour lui, les plantes sont naturellement en meilleure santé dans certaines conditions : un pH proche de 6,5 et un potentiel redox (mesure du caractère oxydé ou réduit su sol) proche de 200 mV. En traitant un symptôme, les produits phytosanitaires modifient les paramètres du milieu. La plante est déstabilisée et devient plus sensible à l’arrivée d’autres pathogènes.
Bruno cherche donc à maintenir ses cultures dans leur zone de confort afin de les rendre plus fortes face aux pathogènes et au stress. Il utilise pour cela de nombreux produits comme les thés de compost, les décoctions de plante et les purins qu’il produit lui-même. Très peu de références existent en la matière et les agriculteurs sont obligés d’apprendre par eux-mêmes ou auprès d’autres producteurs. Ils ne s’interdisent cependant pas le recours à la chimie si besoin est.
On est en chemin
« On est en chemin. On a beaucoup d’espoir et beaucoup de gamelles aussi. Il faut être très modeste », conclut Xavier. Les agriculteurs redécouvrent de nouvelles façons de produire, mais estime en être qu’au début et ne prétendent pas donner de solutions toutes faites malgré l’intérêt qu’ils suscitent.